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lundi 12 décembre 2016

Comment, par la passion, le Christ a réconcilié les hommes avec Dieu, selon S. Thomas d'Aquin

Le Christ-Prêtre en Croix, 
Église Notre-Dame-de-la-Miséricorde
d' Ars-sur-Formans


Objections

1. Il n'y a pas de réconciliation entre amis. Or Dieu nous a toujours aimés : « Tu aimes tout ce qui existe et tu ne hais rien de ce que tu as fait (Sagesse 11, 25). »

2. La même réalité ne peut être à la fois principe et effet ; c'est pourquoi la grâce, qui est principe de mérite n'est pas méritoire.

Or l'amour de Dieu est le principe de la passion du Christ, comme le montre S. Jean (3, 16) : « Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique. »

Il ne semble donc pas que par la passion du Christ nous avons été réconciliés avec Dieu de telle sorte qu'il ait commencé de nous aimer à nouveau.

3. La passion du Christ a été accomplie par les meurtriers du Christ qui, de ce fait, ont gravement offensé Dieu.

La passion est donc pour Dieu un motif d'indignation plus que de réconciliation.

En sens contraire, il y a cette parole de S. Paul (Romains 5, 10) : « Nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils. »


Réponse

La passion du Christ est la cause de notre réconciliation avec Dieu sous deux rapports :

En tant qu'elle écarte le péché, par lequel les hommes sont constitués ennemis de Dieu, selon le livre de la Sagesse (14, 9) : « Dieu déteste également l'impie et son impiété », et selon le Psaume (5, 7) : « Tu hais tous les malfaisants. »

En tant qu'elle est un sacrifice souverainement agréable à Dieu

Car l'effet propre du sacrifice, c'est de nous rendre Dieu favorable. Ainsi un homme pardonne une offense commise contre lui, à cause d'un service agréable qu'on lui rend.

Aussi est-il écrit (1 Samuel 26, 19) : « Si c'est le Seigneur qui t'excite contre moi, qu'il soit apaisé par l'odeur d'un sacrifice. »

Et pareillement, que le Christ ait souffert volontairement, ce fut un si grand bien que Dieu, à cause de ce si grand bien trouvé dans la nature humaine, s'est apaisé au sujet de toute offense du genre humain, pour tous ceux qui s'unissent de la manière qu'on a indiquée au Christ qui a souffert.


Solutions

1. Dieu aime dans tous les hommes la nature que lui-même a faite. Mais il les hait quant à la faute commise contre lui, selon l'Ecclésiastique (12, 6) : « Le Très-Haut a les pécheurs en haine. »

2. On ne dit pas que le Christ nous a réconciliés avec Dieu en ce sens qu'il aurait commencé de nous aimer à nouveau, puisqu'il est écrit dans Jérémie (31, 3) : « Je t'ai aimé d'un amour éternel. »

C'est parce que la passion du Christ a supprimé toute cause de haine, aussi bien en enlevant le péché qu'en le compensant par un bien plus agréable.

3. Si les meurtriers du Christ étaient des hommes, de même le Christ mis à mort.

Or la charité du Christ souffrant a été plus grande que l'iniquité des meurtriers.

Et c'est pourquoi la passion du Christ a été plus puissante pour réconcilier Dieu avec tout le genre humain que pour provoquer sa colère.


Référence

S. Thomas d'Aquin, Somme théologique, 3e partie, question 49, article 4.