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mardi 4 juin 2019

L'œuvre de la justice, de la miséricorde et de la bonté de Dieu dans les créatures, selon S. Thomas d'Aquin



Estampe n°17 de la Vita D. Thomae Aquinatis, de Otto van Veen
 Concernant la troisième [objection] il faut dire qu’à chacun est dû ce qui lui appartient. Or, on dit qu’appartient à quelque chose ce qui est ordonné à son intention ; comme l’esclave est [ordonné] au maître, et non l’inverse ; en effet est libre ce qui est cause de soi. Par conséquent, dans la notion de « dû », on considère le certain ordre d’exigence ou de nécessité de quelque chose à l’égard de ce à quoi elle est ordonnée. Or, il existe, dans les choses, un ordre double qu’il faut considérer. L’un [est celui] par lequel quelque chose de créé est ordonné à quelqu’autre créature : comme les parties sont ordonnées au tout, l’accident à la substance, et une chose quelconque à sa fin. L’autre ordre [est celui] par lequel toutes les choses créées sont ordonnées à Dieu. Ainsi donc, dans l’œuvre de Dieu, le dû peut-être considéré de deux manières : soit en ce que quelque chose est dû à Dieu ; soit en ce que quelque chose est dû à une [autre] chose créée. Et de ces deux manières, Dieu accorde ce qui est dû. En effet, il est dû à Dieu que soit réalisé dans les choses ce que conçoit Sa sagesse et Sa volonté, et ce qui manifeste Sa bonté : et en cela, la justice de Dieu regarde Son honneur (decentia), selon lequel Il S’accorde à Lui-même ce qui Lui est proprement dû. D’autre part, il est dû à une chose créée d’avoir ce qui lui est ordonné : comme à l’homme [est dû] d’avoir des mains et d’être servi par les autres animaux. Et ainsi également Dieu met en œuvre la justice quand Il donne à chacun ce qui lui est dû en raison de sa nature et de sa condition. Mais ce dû dépend du premier : parce qu’il est dû à chacun ce qui lui est ordonné selon l’ordre de la sagesse divine. Et bien que Dieu, de cette manière, donne à quelqu’un ce qui [lui] est dû, Il n’est pas, cependant, Lui-même débiteur : parce que Lui-même n’est pas ordonné aux autres, mais [ce sont] les autres, plutôt, [qui] Lui sont ordonnés. Et par conséquent, on dit tantôt que la justice est, en Dieu, ce qui convient [condecentia] à Sa bonté, tantôt [qu’elle est] la rétribution des mérites. Et Anselme signale ces deux points de vue, en disant : « Lorsque Tu punis les mauvais, c’est juste, parce que cela convient à leurs mérites ; mais lorsque Tu épargne les mauvais, c’est juste parce que cela convient à Ta bonté. »

Référence  

S. Thomas d’Aquin, Somme théologique, 1ère partie, question 21, article 1, ad 3. Disponible, dans le latin original sur <http://www.corpusthomisticum.org/sth1015.html#29333>, consulté le 4 juin 2019.


Je réponds en disant qu’il est nécessaire qu’on trouve, en toute œuvre de Dieu, la miséricorde et la vérité ; si toutefois la miséricorde est prise au sens de supprimer la déficience de quelque chose ; quoique toute déficience ne puisse à proprement parler être considérée comme un malheur, mais seulement la déficience d’une nature rationnelle [=hommes ou anges] qui est susceptible d’être heureuse. En effet le malheur est le contraire du bonheur. Or cette raison de nécessité existe parce que, quoiqu’un dû qui est accordé conformément à la justice divine, soit dû ou à Dieu, ou à une créature, aucun des deux [attributs] ne peut être omis dans une œuvre de Dieu. En effet, Dieu ne peut faire quelque chose qui ne convienne à Sa sagesse et à Sa bonté ; c’est de cette façon, avons-nous dit, que quelque chose est dû à Dieu. Pareillement, quoi qu’Il fasse dans les choses créées, [Dieu] le fait d’une façon convenable à l’ordre et à la proportion ; c’est en cela que consiste la raison de justice. Et ainsi, il faut que la justice se rencontre en toute œuvre de Dieu. Or, l’œuvre de la justice divine présuppose toujours l’œuvre de la miséricorde et est fondée en elle. En effet, rien n’est dû à la créature, si ce n’est à cause de quelque chose qui préexiste en elle ou que l’on considère avant elle : et de nouveau, si cela est dû à la créature, cela le sera à cause de quelque chose d’antérieur. Et comme l’on ne peut continuer ainsi à l’infini, il faut qu’on en arrive à quelque chose qui dépende de la seule bonté de la volonté divine, qui est le terme ultime. Comme si nous disions que [le fait d’] avoir des mains est dû à l’homme à cause de [son] âme rationnelle ; que [le fait d’] avoir une âme rationnelle [est dû à ce même homme] pour qu’il soit un homme ; et que [le fait d'] être un homme [est dû] à cause de la bonté divine. Et ainsi, en toute œuvre de Dieu, comme à sa racine première, apparaît la miséricorde. Sa force [agissante] est sauvegardée dans toute les suites [qu’elle engendre] ; et elle agit même plus fortement en elles, tout comme la cause primaire influe plus fortement que la cause secondaire. Et à cause de cela, également, tout ce qui est due à une créature, Dieu, par l’abondance de sa bonté, le dispense plus largement que ne l’exige la proportion de la chose [créée]. En effet, ce qui suffirait à conserver l’ordre de la justice est moindre que ce que confère la bonté divine qui dépasse toute la proportion de la créature.

Référence  

S. Thomas d’Aquin, Somme théologique, 1ère partie, question 21, article 4. Disponible, dans le latin original sur <


La traduction en version française est le fait de l'auteur de ce blogue.

lundi 3 juin 2019

L'expiation pénale est bien une théorie catholique selon le R. P. Christian Pesch



La flagellation de N. S. Jésus-Christ par W. A.  Bouguereau, 1880
Les Praelectiones dogmaticae du R[évérend] P[ère] Christian Pesch, S. J. [de la Compagnie de Jésus, ou jésuite], sont trop avantageusement connues pour qu'il y ait lieu de présenter l'auteur. Depuis trente ans, ce livre a pris place dans nombre de bibliothèques sacerdotales. Ses neuf tomes, parvenus à leur cinquième édition et complétés par un très important volume De inspiratione Sacrae Scripturae, constituent, sans nul doute, l'une des Sommes théologiques les mieux adaptées aux besoins du temps présent (1). Si on a pu critiquer quelques points, du moins ne leur a-t-on jamais contesté le mérite d'une information exacte touchant l'antiquité ecclésiastique, ni le mérite, plus précieux, du sens chrétien.

Il y a quelques années, le P[ère] Pesch a cru devoir reprendre la plume dans un but d'apologie personnelle. Il s'agissait de prouver qu'il n'a pas, dans ses Praelectiones dogmaticae, présenté la théologie de la Rédemption sous un faux jour. Ce soin pouvait paraître superflu ; mais l'émulent théologien a pris de là occasion pour rappeler les enseignements de l'Église sur le dogme fondamental du christianisme; d'où la portée doctrinale et l'intérêt durable du livre (2).

Ce livre pose deux questions:

1° Le Père Pesch, théologien de la Rédemption, s'est-il fait le défenseur de la théorie qui présente le dogme sons la forme exclusive de l'expiation pénale? — Question de fait.

2° La théorie, de l'expiation pénale est-elle une théorie protestante ? — Question de doctrine.

Sur le point de fait, la réponse peut être brève. Non, le Père Pesch ne s'est pas fait l'avocat de cette théorie exclusive. Il suffit d'ouvrir le tome V des Praelectiones dogmaticae, et de lire. Si une thèse, la XXXIIIe [33e], est consacrée à la théorie de l'expiation pénale, beaucoup d'autres thèses présentent les multiples aspects du dogme. Donc l'assertion qui le donne pour un défenseur de cette théorie exclusive, est simplement fausse.

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Reste le point de doctrine, qui doit nous retenir davantage, puisque, aussi bien, c'est le mystère même du salut, dans son fond, qui est en cause. La théorie de l'expiation pénale est si peu une théorie protestante, qu'elle pénètre l'Ancien et le Nouveau Testament, la tradition des Pères, l'enseignement des Conciles, toute la tradition dogmatique et ascétique de l'Église. Telle est la thèse victorieusement soutenue par le. Père Pesch. Rappelons-la, d'après lui.

Toute la tradition chrétienne, appuyée sur le témoignage répété des Évangiles, reconnaît dans le chapitre LIII [53] d'Isaïe le tableau anticipé de notre Rédemption. On voudra bien nous dispenser de transcrire une fois de plus cette page vénérable à tous les chrétiens : chacun peut ouvrir sa Bible et lire (3).

Cet homme de Dieu, qui a pris sur lui nos souffrances, qui apparaît à nos yeux châtié, transpercé pour nos péchés, broyé pour nos iniquités, sur qui pèse le châtiment qui nous, sauve, sur qui Iahvé fait tomber, l'iniquité de tous, qui, pour justifier des multitudes, s'est chargé de leurs iniquités, qui fut compté parmi les pécheurs, tandis qu'il portait les fautes d'une multitude, redisons-le avec toute la tradition, c'est le Christ de l'expiation pénale. C'est bien le même qui, à la Cène, redisait à ses Apôtres : « Mon corps sera livré pour vous... mon sang sera livré pour beaucoup, en rémission des péchés (4). » C'est bien le même que saint Paul nous montre « fait péché pour nous (5) », « fait malédiction (6) » ; et saint Pierre, « portant nos péchés en son corps sur le bois (7) ». C'est le même qui, montant au Calvaire, esquissait un parallèle entre les coups de la justice divine tombant sur lui et les coups réservés aux pécheurs : « S'il en est ainsi du bois vert, qu'en sera-t-il du bois sec (8) ? »

Cet agneau qu'on portera la boucherie, c'est le même dont Jean-Baptiste dira : « Voici l'Agneau de Dieu, voici celui qui ôte les péchés du monde (9). »

Ces pages de nos saints Livres demeurent, et il n'est loisible à personne de porter la main sur des réalités si vénérables.

Assurément le Christ était l'innocence même, et la manière dont il porte le poids de nos péchés diffère entièrement de celle dont le portent ceux qui, par naissance ou par leur libre, choix, sont constitués pécheurs. Il n'en est pas moins vrai, et c'est l'enseignement de l'Écriture, que le châtiment divin dû aux pécheurs se décharge en tombant sur l'Innocent ; et que la libre acceptation de ce châtiment par le Fils de Dieu le détourne de l'humanité coupable. La nature de ces coups ne change pas parce que le Fils de Dieu s'y offre librement, et ce sont toujours les coups de la justice divine. Non pas que Dieu trouve une espèce de rassasiement dans la souffrance de l'Innocent ; mais l'Ordre éternel appelle un règlement de compte, et la justice ne s'efface pas tellement devant la miséricorde, qu'elle ne réclame une sorte de transfert de la peine.

Substitution de l'Innocent aux coupables, c'est le thème exploité depuis vingt siècles par la théologie catholique de la Rédemption. C'est en particulier le thème exploité, à la fin du onzième siècle; par saint Anselme de Cahtorbéry, dans sa théorie de la satisfaction vicaire, que les docteurs de l'École ont assouplie et enrichie, mais sans la vider de ce qui en faisait le prix et la force : l'idée des exigences propres à la justice de Dieu.

Que d'autres attributs entrent en jeu, c'est bien sûr, et nul ne doute que l'amour ne mène tout. Mais il ne s'agit pas d'opter entre la justice et l'amour. Il s'agit de montrer, dans cette œuvre d'amour qu'est essentiellement la rédemption de l'humanité, le rôle essentiel de la justice.

C'est à quoi n'ont pas manqué les théologiens de l'École, depuis saint Anselme, qui donna même à ce schéma juridique une raideur excessive, jusqu'à saint Thomas, qui, en détendant et assouplissant le schéma juridique d'Anselme, se garda bien d'en supprimer le ressort. À son tour il redit que, dans cette œuvre d'amour, la justice divine, et nommément la justice vindicative, trouve son compte. L'énergique raccourci de l'Apôtre, montrant le Christ courbé sous le poids de la colère et de la malédiction, est traduit dans la Somme [théologique] en langage .métaphysique. Dans l'agonie et dans la mort de Jésus, saint Thomas fait remarquer la rigueur d'une justice qui ne se laisse pas désarmer sans affirmer ses droits jusque dans l'acte de pardon : “Dei severitas, qui peccatum sine poena dimittere noluit [La sévérité de Dieu qui ne veut pas remettre le péché sans la peine] (10). Sévérité, qui est proprement l'acte d'une justice vindicative. “Severitas attenditur circa exteriorem inflictionem poenarum” [La sévérité est considérée par rapport au fait d’infliger des peines extérieurement], lisons-nous encore (11). Que ces mots n'épuisent pas la théologie de la Rédemption, nul n'en doute. Mais si on se propose de l'enrichir, il ne faut pas venir nous apprendre que l'obéissance du Christ est un acte moral, et un acte moral seulement parce que elle témoigne d'un grand amour. Ces découvertes sont puériles.

Le Père Pesch consacre une centaine de pages à relever dans l'Écriture et à suivre à travers toute la
tradition la notion d'expiation pénale appliquée au dogme de la Rédemption. La preuve est surabondante ; mais elle ne saurait désarmer l'objection, à moins de s'expliciter dans une analyse théologique. Car aucun texte ne saurait avoir raison de ce préjugé, que les catégories archaïques de la pensée chrétienne sont usées, qu'elles appellent un travail de réinterprétation et d'adaptation. On ne gagnera rien contre cette sophistique, à moins de mettre la cognée à la racine de l'arbre et de revendiquer tout ce qu'il y a, non seulement de métaphysique religieuse, mais encore de dogme, incrusté dans ces vieilles métaphores — qui ne sont pas seulement métaphores, — de rachat, de sacrifice, d'expiation pénale. C'est ce que le Père Pesch fait très, sagement et très efficacement dans les dernières pages de son livre.

S'il est écrit que Dieu a aimé le monde jusqu'à donner son Fils unique (12), que le Fils de l'homme est venu donner sa vie comme rançon d'un grand nombre (13), c'est que, par la vertu de ce don et de cette immolation volontaire, l'équilibre troublé est rétabli, la paix restaurée entre le ciel et la terre. La valeur objective de cette transaction consentie par Dieu appartient au fond le plus authentique de la doctrine révélée ; et à moins de renoncer.à parler en langage humain, il faut reconnaître la valeur imprescriptible des images qui là convoient jusqu'à nous. Aucun moralisme ne saurait la volatiliser.

Mais il y a le reproche de protestantisme, adressé à la théorie de l'expiation pénale, et qui demande une réponse. En vérité, la théologie de la Rédemption a subi, de la part du protestantisme, deux déformations diamétralement opposées : l'une, de la part de l'ancienne orthodoxie luthérienne ; l'autre, de la part du moderne protestantisme libéral; la vérité catholique consiste à se garder de l'une et de l'autre.

L'ancienne orthodoxie luthérienne, en mettant l'accent sur la justice vindicative de Dieu, aboutit à majorer jusqu'au blasphème,et jusqu'à l'absurdité la théorie de l'expiation pénale. Elle veut que le Christ ait porté réellement, comme un coupable, la peine de nos péchés. Elle veut qu'il ait subi dans sa chair la somme de tous les châtiments dus à l'humanité coupable, et que la justice divine ait cherché dans une compensation arithmétique la satisfaction qui lui était due. Elle veut que le Christ ait subi même les tourments de l'enfer, ceux de ce monde étant inégaux aux fautes qu'il devait expier ; et elle prend à la lettre, comme l'expression d'un réel désespoir, les cris d'angoisse du Christ à Gethsémani et sur la croix. Parler de blasphème et d'absurdité n'est pas trop fort devant ces inventions des Gerhard (14) et des Quenstedt (15) ; l'horreur qu'elles inspirent ne s'exprimera jamais avec trop d'énergie.

Le moderne protestantisme libéral, en s'engageant dans une voie diamétralement opposée, aboutit à la suppression de l'expiation pénale. Il ne veut voir en Dieu qu'un Père, et estime qu'on méconnaît sa bonté en parlant de justice vindicative. Il estime qu'en faisant appel aux exigences de la justice en regard des exigences de l'amour et de la miséricorde, on déchaîne en Dieu un conflit absurde, qui relève non de la métaphysique religieuse, mais de la pire mythologie. Il estime que l'on fait injure à Dieu en parlant de rédemption objective et de prix acquitté pour le salut du genre humain. Il estime qu'on lui fait encore injure en parlant de sacrifice au sens liturgique du mot, quel qu'en soit d'ailleurs le rite, et beaucoup plus s'il s'agit d'un sacrifice sanglant. Dès lors les idées de rédemption et de sacrifice rédempteur doivent rejoindre, dans le musée des antiquités religieuses, l'idée d'expiation pénale. Toutes les spéculations de la théologie autour de ces idées sont vaines. L'ordre moral offre d'ailleurs assez de grands mots sous lesquels on peut ranger, les plus hautes réalités chrétiennes : amour, sympathie, magnanimité, don de soi, exemple, émulation généreuse... À l'aide de ces mots, on peut reconstruire toute la dogmatique chrétienne ; — oui, mais après l'avoir vidée de son contenu historique. Un tel christianisme n'a qu'un défaut : il est tout entier construit de main d'hommes.

Entre ces deux déformations diamétralement opposées de la donnée chrétienne, il est clair que l'écart est grand. Nous ne nous attarderons pas à discuter laquelle mérite le plus d'anathèmes : ce ne serait sans doute pas la première, car la répulsion même qu'elle provoque suffit à en préserver nos générations. Nous ne nous attarderons pas non plus à rechercher par quelles teintes dégradées on peut passer insensiblement de l'une à l'autre. Il nous suffit que toutes deux soient hérétiques. La doctrine catholique répudie l'un et l'autre excès. Elle fait sa part à la justice divine vindicative, à l'expiation pénale si fortement marquée dans l'Écriture, à la rédemption objective, à la réelle solidarité de tous les hommes dans le Christ nouvel Adam. Et elle fait sa part à l'amour paternel de Dieu, qui l'a porté à livrer pour nous son Fils unique, à la valeur d'exemple que possède la passion du Fils de Dieu, à la contagion de la grâce, qui excite les chrétiens à recourir à sa plénitude.

Toute exposition qui respecte ces divers éléments peut être catholique, et certes il y a place à bien, des diversités dans l'exploitation de la donnée traditionnelle, à une grande liberté dans le dosage. Chacun demeure libre de méditer l'aspect qui répond le mieux à son tour d'esprit et à l'attrait de sa piété. Mais toute exposition qui délibérément prononce l'exclusion contre l'un quelconque de ces éléments, est déficiente, elle est fausse, et cesse d'être catholique.

Le R[évérend] P[ère] Pesch a rappelé très opportunément le devoir de ne rien sacrifier du dépôt traditionnel. Il a rappelé très opportunément combien il est naturel que les esprits enivrés d'un certain moralisme trouvent insipide le simple langage de la foi.

On ne peut que lui donner raison quand il rappelle que la notion de justice divine vindicative est inscrite dans l'Écriture, depuis la première page (Genèse 3, 14-15) jusqu'à la dernière (Apocalypse 16, 5-6), et doit pénétrer l'exposition de tous les mystères chrétiens.

On ne peut que lui donner raison quand il montre dans la notion de satisfaction vicaire le fond même de la théologie rédemptrice, consigné dans l'Écriture, exploité par les Pères, mis en formule par saint Anselme, développé encore par les grands scolastiques, consacré par les définitions de l'Église.

On ne peut que lui donner raison quand il montre dans le drame du Calvaire le Sacrifice du Nouveau Testament, non par métaphore, mais au sens le plus réel ; sacrifice dont tous ceux de l'Ancien Testament n'étaient que les ombres et qui, loin d'avoir à mendier à travers l'histoire des religions les éléments d'une définition précaire, offre le type éternel du sacrifice, par où tous les autres deviennent intelligibles ; sacrifice perpétué, sur tous les autels du Nouveau Testament sous une forme dont le Calvaire nous donne la clef ; sacrifice qu'on ne saurait méconnaître sans imaginer cette chose monstrueuse qui répugne aux païens mêmes : une religion sans sacrifice ; sacrifice dont la formule n'est autre que l'unique réalité chrétienne, mise en termes de rituel.

On ne peut que lui donner raison quand il revendique le sens profond — et réel aussi — de ces mots qui n'en font qu'un : rédemption, rachat, rançon. Car s'il y a dans, l'ordre d'idées lié à ces mots un élément caduc, grâce au progrès de. la société humaine, d'où le christianisme a lentement éliminé le servage, il y a aussi un élément intangible. L'élément caduc est accidentel et superficiel : c'est le spectacle de la condition servile où la génération contemporaine du Christ trouvait l'image parfaitement actuelle et sensible de l'abjection où nous réduit le péché. L'élément intangible est essentiel et foncier : c'est cette abjection même, d'où nous avons émergé grâce au Fils de Dieu et dont lui seul nous préserve : on n'a pas trouvé encore, pour en peindre la réalité, de terme plus technique et plus expressif que ce terme de rachat, évoquant le souvenir de la denrée humaine, de la dette inexpiable que notre être ne suffit pas à solder et du geste royal qui nous affranchit. Qu'on parcoure les annales, à peine closes, de l'esclavage ; dans cette contrainte qui livre les corps à un maître tyrannique et dans la rançon qui les émancipe, on trouvera l'image, imparfaite sans doute, mais en somme la moins impropre qui soit, de cette contrainte qui livre les enfants de Dieu, déchus de l'héritage paternel, au plus dur tyran, pour autant qu'ils ne lui sont pas arrachés par Celui qui tient leur sort en ses mains. Image, empruntée, non plus à la catégorie rituelle, mais à la catégorie sociale. On n'a jamais dit mieux, et il ne semble pas possible de concevoir mieux.

Très opportunément, le Père Pesch rappelle qu'il y a quelque trente ans, Auguste Sabatier, en vulgarisant dans sa langue claire les spéculations des rationalistes allemands, fit tourner les têtes de quelques théologiens français. Nous avons tous connu de ces théologiens, et plût à Dieu que toutes les têtes eussent retrouvé leur assiette ! Voici quelques-unes de ces pages, dont le fond nous était venu d'Allemagne et que le Père Pesch a pris la peine de retraduire en allemand (15). Frappé de leur actualité, nous les avions transcrites pour notre usage personnel, et nous n'avons eu qu'à les extraire de nos notes quand son livre nous les a remises sous les yeux.

Pour accomplir la tâche qui incombe aujourd'hui à la pensée chrétienne, il s'agit de débarrasser enfin le vieux dogme des notions vieillies dans lesquelles il a été conçu et, est resté enfermé. Ces notions correspondantes à.un état inférieur de la conscience religieuse ne conviennent plus pour expliquer et traduire les expériences et les révélations de la conscience chrétiennes. Ce sont de grossiers miroirs dans lesquels, les réalités supérieures se déforment. La mort du Christ est un acte essentiellement moral, dont la signification et la valeur, proviennent uniquement de l'intensité de la vie spirituelle et du sentiment de l'amour dont il témoigne. Assez longtemps, on l'a fait entrer dans les catégories antiques et grossières du sacrifice, rituel et de la satisfaction pénale. Il serait temps de laisser tomber ces vieux oripeaux, de considérer cette mort du Christ en elle-même, en partant du sentiront moral qui l'a inspirée.

Par exemple, les idées de mérite et. de satisfaction cadrent-elles avec la principe essentiellement différent de la religion de la grâce, de la rédemption par l'amour ? N'est-on pas tout de suite condamné au plus grossier contresens, quand on parle des mérites que le Christ s'est acquis devant Dieu et qui peuvent du dehors être reportés sur nous ? Cette idée de mérites n'est-elle pas au fond anti-évangélique? N'aurait-elle pas choqué la consscience filiale de Jésus ? Ne nous ramène-t-elle pas fatalement, si nous voulons construire avec elle une doctrine chrétienne, à la religion de la loi ? (Romains 4, 1-4). Et n'est-il pas très remarquable que ces mots « mérites du Christ » ne sont jamais venus sur la bouche ou sous la plume des auteurs du Nouveau Testament ?

Il faut en dire, autant de l'idée de satisfaction. Le mot se trouve pour la première fois dans Tertullien, appliqué aux œuvres de pénitence, non à l'œuvre du Christ. Il n'a pas de correspondant en grec, et on ne trouve pas l'idée qu'il exprime dans les Pères d'avant Nicée. À plus forte raison, elle est absente du N. T. ; et il suffit de la rapprocher de la piété de Jésus envers le Père, pour sentir aussitôt combien elle lui est contradictoire... De quelle satisfaction a besoin le Père de la parabole, pour pardonner à l'enfant repentant qui vient à lui?

Les notions de sacrifice, d'oblation, de propitiation ou d'expiation proviennent des cultes antérieurs au christianisme, et à moins .d'admettre, avec l'auteur de l'épître aux Hébreux, l'institution divine de ces formes cultuelles élémentaires et légèrement anthropomorphiques, il est impossible de rapprocher, autrement que par métaphore, la mort du Christ sur la croix du rite de la victime, immolée et brûlée sur l'autel... Nous ne sommes plus dans le cadre inférieur d'un rituel sacerdotal; nous sommes dans les plus saintes réalités de la vie morale.

Il faut en dire autant de l'idée de rançon, et de la métaphore qu'elle fournit encore au langage religieux...

Nous croyons inutile de commenter cette page, après le P[ère] Pesch ; mais nous renverrons à ses réflexions très topiques. C'est se payer de mots que de nous inviter à remplacer l'idée de sacrifice par celle. de grand acte moral. D'après l'enseignement catholique, le sacrifice est essentiellement un acte du culte divin, et les catholiques entendent bien faire acte moral en offrant sacrifice à Dieu. Même dans l'état d'innocence, l'homme devait à Dieu des sacrifices ; la déchéance l'oblige plus particulièrement à des sacrifices expiatoires, et le Christ en a voulu être là victime, en même temps qu'il en est le grand prêtre. Le sacrifice du Christ doit sa dignité suprême à la personne du sacrificateur ; mais le choix de la victime n'est pas chose indifférente, non plus que le mode d'oblation. Déjà sous l'Ancien Testament, la rémission des péchés était liée au rite de l'immolation sanglante (Lévitique 17, 11) ; beaucoup plus l'est-elle sous le Nouveau, et ce n'est pas en vain que les écrits apostoliques appellent notre attention, avec tant d'insistance, sur la vertu propitiatoire du sang de l'Agneau divin; voir Matthieu 26, 28 ; Actes 20, 28 ; Romains 3, 25 ; Éphésiens 1, 7 ; Hébreux 9, 14 ; Colossiens 1, 20 ; 1 Pierre 1, 18-19 ; 1 Jean 1, 7 ; Apocalypse 1, 5 ; 5, 9 ; 7, 14 ; 22, 14 et beaucoup d'autres passages. La liturgie de l'Église, en ses pages les plus augustes, fait écho à ces paroles de l'Écriture, sans préjudice du caractère essentiellement moral du sacrifice.

Le Père Pesch s'attache, dans ses dernières pages, à développer un thème d'autant plus chrétien qu'il est moins neuf : la vertu rédemptrice de la souffrance unie à la souffrance du Fils de Dieu. Il n'a point de peine à montrer dans tout le Nouveau Testament,.dans l'enseignement des Pères et des ascètes modernes, cette loi fondamentale du christianisme, écrite en caractères sanglants ; loi plus féconde, observe-t-il, que la conception soi-disant, « plus profonde » suggérée pour moderniser la vieille foi. On ne lira pas sans émotion ce testament d'un homme qui a si longtemps et si fructueusement, travaillé pour l'Église. Il conclut, et nul chrétien ne sera assez ennemi de la croix du Christ pour ne pas conclure avec lui : “In cruce salus” [« Dans la croix [est] le salut »].

Sans reprendre après lui l'enquête qu'il a si consciencieusement, si victorieusement menée, nous produirons nous aussi un texte moderne, d'autant plus propre à nous instruire sur l'essence du christianisme, qu'il nous apporte un écho direct du Cœur de Jésus. Nous l'empruntons aux révélations très autorisées de la voyante de Paray-le-Monial.

Sainte Marguerite Marie contemple le Seigneur agonisant au Jardin des Oliviers; et elle entend ces paroles (16) :

C'est ici où j'ai plus souffert qu'en tout le reste de ma Passion, me voyant dans un délaissement général du ciel et de la terre, chargé de tous les péchés des hommes. J'ai paru devant la Sainteté de Dieu, qui sans avoir égard à mon innocence, m'a froissé en sa fureur, me faisant boire un calice qui contenait tout le fiel et l'amertume de sa juste indignation, et, comme s'il eût oublié le nom de Père, pour me sacrifier à sa juste colère. Il n'y a point de créature qui puisse, comprendre la grandeur des tourments que, je souffris alors. C'est cette même douleur que l'âme criminelle ressent, lorsqu'étant présentée devant le tribunal de la sainteté divine qui s'appesantit sur elle, la froisse et l'opprime et l'abîme en sa juste rigueur. (...)
[Ma justice est irritée et prête de punir, par des châtiments manifestes, des pécheurs cachés, s’ils ne font pénitence ; et je te veux faire connaître lorsque ma justice sera prête à lancer ses coups sur ces têtes criminelles. Ce sera lorsque tu sentiras appesantir ma sainteté sur toi qui dois élever ton cœur et tes mains au ciel , par prières et bonnes œuvres, me présentant continuellement à mon Père, comme une victime d’amour, immolée et offerte pour les péchés de tout le monde ; me mettant comme un rempart et un fort assuré entre sa justice et les pécheurs, afin d’obtenir miséricorde, de laquelle tu te sentiras environnée lorsque je voudrai faire grâce à quel[ques]-uns de ces pécheurs Ce sera pour lors que tu me dois offrir à mon Père éternel comme l’unique objet de ses amoureuses complaisances, en action de grâces de la miséricorde qu’il exerce envers les pécheurs. (...)]

Nous trouvons là tout ensemble un écho fidèle du gémissement poussé par le Christ agonisant au jardin et sur la croix ; un commentaire de saint Paul parlant du Christ fait péché pour nous et maudit de Dieu ; l'affirmation très nette d'une justice vindicative, s'exerçant dans la passion du Christ ; enfin la justification, par un exemple très vénérable, du tour quelquefois très hardi donné par des orateurs sacrés à la théorie de l'expiation pénale. Nous ne saurions résumer dans une page plus saisissante les enseignements de la foi sur un aspect essentiel, de la Rédemption.

Notes

(1) Praelectiones dogmaticae, auctore Christiano PESCH, S. J. Friburgi Brisgoviae, Herder, IX Tomi. In-8°. La 5e édition a commencé à paraître en 1915.

(2) Das Sühneleiden unseres göttlichen Erlösers : von Christian PESCH, S. J. Freiburg im Breisgau, 1916. In-8°, VIII-177 pages.

(3) Nous nous référons à la traduction sur l'hébreu, donnée en 1905 par le P. A. Condamin. [Isaïe 52, 13-53, 12. Disponible sur <https://archive.org/details/CondaminEsaie/page/n341>, consulté le 2 juin 2019 : ]
 [Voici que mon Serviteur prospérera, il montera, grandira, s’élèvera bien haut ;
Et si des multitudes l’ont vu avec horreur, par Lui des multitudes seront comblées de joie.
Et Lui dont le visage était défiguré, et ne ressemblait plus à une face humaine,
La multitude des nations l’admirera, et les rois fermeront la bouche devant Lui !
Car ils voient ce qu’on ne leur avait pas annoncé ; ils comprennent ce qu’ils n’avaient pas entendu.

Qui croira ce que nous avons entendu ? et le bras de Iahvé, à qui sera-t-il révélé ?
Il a grandi devant Lui comme un rejeton, comme le jet d’une racine sur un sol aride ;
Sans grâce, sans éclat pour attirer les regards, et sans beauté pour plaire ;
Méprisé, rebut de l’humanité, homme de douleurs et familier de la souffrance,
Devant qui on se voile la face, méprisé et, à nos yeux, néant!

Mais II a pris sur Lui nos souffrances, et de nos douleurs il s’est chargé ;
Et il paraissait à nos yeux châtié, frappé de Dieu et humilié.
II a été transpercé pour nos péchés, broyé pour nos iniquités ;
Le châtiment qui nous sauve a pesé sur Lui, et par ses plaies nous sommes guéris.
Tous nous étions errants comme des brebis ; chacun suivait sa propre voie ;
Et Iahvé a fait tomber sur Lui l’iniquité de nous tous !

II était maltraité, et Lui se résignait, il n’ouvrait pas la bouche ; Comme un agneau qu’on porte à la boucherie, comme la brebis muette aux mains du tondeur.
Il n'ouvrait pas la bouche.
Par un jugement inique il est emporté, et qui songe à [défendre] sa cause
Lorsqu'il est arraché de la terre des vivants, et pour le péché de mon peuple mis à mort ?
On lui prépare une tombe avec les impies, il meurt avec les malfaiteurs ; (
Pourtant il n’y eut point d’injustice en ses œuvres, et point de mensonge en sa bouche ; mais il plut à Iahvé de le broyer par la souffrance.

S’ il offre sa vie en sacrifice pour le péché, il aura une postérité, il multipliera ses jours, en ses mains l'œuvre de Iahvé prospérera.
Délivré des tourments de son âme, il [le] verra ; ce qu’il en connaîtra comblera ses désirs.
Le Juste, mon Serviteur, justifiera des multitudes, il se chargera de leurs iniquités ;
C’est pourquoi je lui donnerai, pour sa part, des multitudes ; il recevra des foules pour sa part de butin :
Parce qu’il s’est livré à la mort, et qu’il fut compté parmi les pécheurs,
Tandis qu’il portait les fautes d’une multitude, et qu’il intercédait pour les pécheurs. ]

(4) Matthieu 26, 26-28 ; Luc 22, 19-20.

(5) 2 Corinthiens 5, 21.

(6) Galates 3, 13.

(7) 1 Pierre 2, 24.

(8) Luc 23, 31.

(9) Jean 1, 29.

(10) S. Thomas d’Aquin, Somme théologique, 3e partie, question 47, article 3, ad 1m :

Ad primum ergo dicendum quod innocentem hominem passioni et morti tradere contra eius voluntatem, est impium et crudele. Sic autem Deus pater Christum non tradidit, sed inspirando ei voluntatem patiendi pro nobis. In quo ostenditur et Dei severitas, qui peccatum sine poena dimittere noluit, quod significat apostolus dicens, proprio filio suo non pepercit, et bonitas eius, in eo quod, cum homo sufficienter satisfacere non posset per aliquam poenam quam pateretur, ei satisfactorem dedit, quod significavit apostolus dicens, pro nobis omnibus tradidit illum. Et Rom. III dicit, quem, scilicet Christum, per fidem propitiatorem proposuit Deus in sanguine ipsius.” 

« Concernant la première [objection], il faut dire que livrer un homme innocent à la souffrance et à la mort contre sa volonté, est impie et cruel. Ce n’est pas ainsi que le Dieu Père a livré le Christ, mais en Lui inspirant la volonté de souffrir à notre place/en notre faveur. Et en cela se manifeste la sévérité de Dieu qui ne veut pas remettre le péché sans la peine, ce qu’a indiqué l’Apôtre en disant qu’Il n’a pas épargné Son propre Fils, et Sa bonté, en ce que, alors que l’homme ne pouvait suffisamment satisfaire par une certaine peine qu’il souffrirait, Il lui a donné un satisfacteur ce qu’ a indiqué l’Apôtre en disant qu’Il L’a livré à notre place/en notre faveur. Et, en Romains 3, il dit que Lui, à savoir le Christ, Dieu l’a offert comme propitiateur par la foi en son sang. »

(11) Id., op. cit., 2de partie de la 2e partie, question 157, article 2 ad 1m.

(12) Jean 3, 16.

(13) Matthieu 20, 28; Marc 10, 45.

(14) Johann Gerhard (1582-1637), professeur à Iéna en 1616, et Père de la haute orthodoxie luthérienne. « Alors que la plupart des facultés avaient mis leurs travaux en veilleuse, cet homme, aussi profondément pieux qu'érudit, put, malgré une santé souvent défaillante, formuler d'une manière remarquable la somme de la théologie luthérienne. Ses Loci [theologici] (une œuvre cyclopéenne en 9 volumes), qui n'avaient a priori aucune intention d'élaborer une construction systématique, eurent le mérite de mettre en évidence la sensationnelle cohérence d'un enseignement basé foncièrement et en tous points sur les Saintes Écritures. Et il y avait en cela même l'argument le plus puissant et le plus convaincant, autant contre les erreurs romaines que contre les déviations nouvelles. L'exposé simple et positif, irénique et sans parti pris polémique, des affirmations y apporte toujours à nouveau la preuve désarmante d'être dans l'évidence. Aussi la parution de cette œuvre, en 1621, en pleine guerre, fit une profonde impression, et elle est restée pendant des siècles et jusqu'à ce jour une référence. » Cf. Jean Bricka, « Histoire de l'Église Évangélique Luthérienne. Synode de France et de Belgique. ». Disponible sur <http://eglise.luth.stmaur.free.fr/bibliotheque/BRICKA.pdf#page=4>, consulté le 2 juin 2019
  « Sous l’influence de Johann Arndt, il commença ensuite à s’intéresser à la spiritualité patristique et médiévale. Dans ce retour aux pères de l’Église, Gerhard redécouvrit le principe du sens spirituel de l’exégèse ; il développa et soutint une mystique de l’union au Christ, présentée comme le sens ultime de la justification par la foi. Son œuvre, caractérisée par cette synthèse des dimensions expérimentale, rationnelle et contemplative, connut une large diffusion et marqua en profondeur la théologie luthérienne. » Cf. « 17 août ». Disponible sur <http://www.peintre-icones.fr/PAGES/CALENDRIER/Aout/17.html>, consulté le 2 juin 2019.

Johann Andreas Quenstedt (1617-1688) est un théologien allemand, représentant de l'orthodoxie luthérienne. Professeur à l’université de Wittemberg en Allemagne, son ouvrage le plus important est le Theologia didactico-polemica sive Systema theologicum, paru en 1685, somme théologique, s’ajoutant aux œuvres déjà nombreuses de la théologie luthérienne du XVIIe siècle. Cf. « Johann Andreas Quenstedt ». Disponible sur <https://de.wikipedia.org/wiki/Johann_Andreas_Quenstedt>, consulté le 2 juin 2019.

(15) Auguste Sabatier, La doctrine de l'expiation et son évolution historique, p. 95-98. Paris, 1903.

(16) Écrit par ordre de la Mère de Saumaise, n. 52 : Vie et œuvres, éd. par Mgr Gauthey, t. II, p. 162.

Référence

Alès Adhémar (d’) (s. j. ; 1861-1938), « Le sens de la Rédemption », in Revue apologétique, année n°17, tome n°33, n°372, 1er novembre 1921, p. 163-174. Disponible sur <https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5574815k/f35>, consulté le 1er juin 2019.

Les notes ont été complétées par l’auteur de ce blogue.

dimanche 2 juin 2019

Le mystère de la Rédemption, par le R. P. Christian Pesch (1853-1925)

 
« Né à Cologne-Mülheim le 25 mai 1853, entré dans la Compagnie de Jésus en 1869, Christian Pesch fut professeur de théologie dogmatique à Ditton-Hall (Angleterre) de 1884 à 1895, puis à Valkenburg (Pays-Bas) jusqu'en 1912 ; à partir de 1909, il s'attacha surtout à ses publications. Il mourut à Valkenburg le 26 avril 1925.

Pesch introduisit la méthode positive dans la théologie néo-scolastique (Praelectiones dogmaticae, 9 vol., Fribourg/Brisgau, 1894-99 ; 6e éd., 1925 ; condensé dans Compendium theologiae dogmaticae, 4 vol., 1913-14 ; 6e éd., 1940). S'inspirant de [S.] Thomas d'Aquin, de Fr[ancisco] Suárez et de [Juan de] Lugo [y de Quiroga], il est un théologien important de son temps ; il contribua à limiter en Allemagne l'influence du modernisme (cf. Theologische Zeitfragen, 6 séries, 1900-16). (...) »

Source : Constantin Bescker, « PESCH (CHRISTIAN), jésuite, 1853-1925) ». Disponible sur <http://beauchesne.immanens.com/appli/article.php?id=7823>, consulté le 1er juin 2019.

Le Christ à Gethsémani, par Carl Heinrich Bloch, 1873




De la satisfaction du Christ Médiateur


Prop. 16. Le Christ homme en tant que médiateur entre Dieu et les hommes a satisfait à Dieu pour les péchés des hommes, par sa passion et par sa mort. De foi ([S. Thomas d’Aquin], Somme théologique, 3e partie, question 48, articles 2-4 ; question 50, article 1).

134. État de la question. Toute cette proposition est définie de foi [de fide], comme il apparaît dans le Concile de Trente, session 5, canon 3; session 6, canon 2 et 7 (Denzinger, n°1513/790, 1522/794, 1529/799).

a) Le Christ homme est dit médiateur, dans la mesure où, [en tant qu’] intermédiaire entre Dieu et les hommes qui, par le péché, étaient devenus des ennemis, Il a réconcilié Dieu avec les hommes. En effet, parce qu’Il était ami de Dieu à cause de l’union hypostatique et à cause de la charité, et ami des hommes, de la race desquels Il est né et dont Il a été constitué la Tête, Il était tout à fait propre à être « l’homme Christ Jésus, médiateur entre Dieu et les hommes » (1 Timothée 2, 5). C’est cela que souligne S. Augustin : « [Il est ] médiateur entre Dieu et les hommes parce qu’[Il est] Dieu avec le Père, homme avec les hommes. Le médiateur [n’est] pas homme sans la nature divine, le médiateur [n’est] pas Dieu sans l’humanité. [Il en est] ainsi du médiateur : la divinité n’est pas médiatrice sans l’humanité, l’humanité n’est pas médiatrice sans la divinité, mais la divinité humaine et l’humanité divine est médiatrice entre la divinité seule et l’humanité seule » (Sermon 47, chap. 12, §. 21 ; S. Thomas, op. cit., 3e partie, question 26, article 1 et suiv.). Le Christ exécuta l’œuvre satisfactoire selon l’humanité [et] il rendit digne [= donna sa valeur à] cette œuvre selon la divinité, afin que la satisfaction pour les péchés soit suffisante.

b) La satisfaction est la réparation d’une offense personnelle. Le péché est une offense commise contre Dieu, celle-ci [étant] d’une malignité infinie. Dieu pouvait remettre cette offense de plusieurs façons (supra n. 112) ; mais Il a voulu que, pour elle, la satisfaction condigne [=exactement proportionné à la faute ou à la récompense] fût procurée par le fait de prendre sur soi la peine due pour le péché. Parce qu’une pure créature ne pouvait la procurer, le Christ, selon la volonté du Père, de par sa libre obéissance et sa charité, a pris sur Lui cette satisfaction qu’il fallait procurer aux hommes, (supra n. 101 et suiv.). Les actes intérieurs d’obéissance et de charité constituent ce qui, par soi, est moral et plaît à Dieu, et [c’est] de ceux-ci [que proviennent] toute la bonté et la dignité morales [qui] rejaillissent sur les actes extérieurs. Néanmoins, le Christ n’a pas seulement satisfait par [ses] seuls actes intérieurs mais également par [ses] actions et souffrances extérieures, parce que Dieu avait disposé les choses de telle sorte que le Christ procurât la satisfaction proprement dite. Or la satisfaction proprement dite est le fait de prendre librement sur soi la peine imposée pour les péchés (cf. Concile de Trente, session 14, chap. 8). « [C’est] pour cela [que] le Fils de Dieu vint dans le monde en assumant la chair, à savoir pour qu’il satisfît pour le péché du genre humain. En effet, quelqu’un satisfait pour le péché d’un autre lorsqu’il prend sur lui la peine due par l’autre pour [son] péché » (S. Thomas, op. cit., 3e partie, question 14, article 1). Et « parce que le Tête et les membres constituent pour ainsi dire une [seule] personne mystique, par conséquent, la satisfaction du Christ appartient à tous les croyants comme à ses membres » (3e partie, question 48, article 2, ad 1). Bien mieux, « la passion du Christ fut une satisfaction suffisante et surabondante pour les péchés de tout le genre humain ; lorsqu’une satisfaction suffisante a été procurée, l’obligation de peine est effacée » (3e partie, question 49, article 3, [conclusion]). Il est certain que Dieu n’avait pas purement et simplement cessé d’estimer les hommes à cause du péché ; en effet, pour les hommes, Il a envoyé son Fils afin qu’ils fussent sauvés par Lui. Il les aimait donc eu égard à la nature qu’Il a faite Lui-même, mais il avait de l’aversion pour eux eu égard à la faute que les hommes avaient commise contre Lui ; et le Christ nous a racheté de cette faute et de la peine due par sa passion (3e partie, question 49, article 4, ad 1), laquelle passion tirait sa valeur non pas de ce qu’elle était imposée au Christ par d’autres, mais de ce que, par charité, elle était librement assumée par le Christ.

c) La Rédemption est, en fait, la même chose que la satisfaction du Christ, mais elle est appelée ainsi sous un autre rapport. Par le péché, l’homme, d’une certaine façon, s’était vendu pour devenir l’esclave de la faute et de la peine (Jean 8, 34 ; 2 Pierre 2, 19), mais également l’esclave du diable, dans la mesure où, en agissant ainsi, il avait fait ce que voulait le diable. Le Christ a donc racheté les hommes de cet esclavage que Dieu avait permis en raison de la faute et qu’il avait décrété en raison de la peine pour la faute, dans la mesure où Il a donné son sang et sa vie comme rançon, par laquelle, une fois acceptée, Dieu nous a libéré des deux esclavages (S. Thomas, op. cit., 3e partie, question 48, article 4). [Ce n’est] pas au diable que cette rançon a été versée (ibid., ad 3). S’ils semble que certains anciens maîtres [=théologiens] l’affirmèrent, il faut interpréter les choses correctement en prenant en compte ce qu’ils expliquent en d’autres endroits, à savoir que la rançon a été versée à Dieu par mode de sacrifice et de culte, et qu’au diable a seulement été donnée la permission d’assouvir sa malignité sur le Christ et de le mettre à mort par ses serviteurs. Par cette mort, la satisfaction [correspondant à] la malignité ayant été accomplie, le diable se vit privé du domaine qu’il avait établi sur les hommes (3e partie, question 49, article 2).

C’est pourquoi il faut reconnaître que le Christ, en tant que Tête du genre humain, a pris sur Lui, pour les hommes, la peine due pour le péché, qu’Il s’est offert à Dieu, qu’Il a ainsi satisfait pour le péché et qu’Il a racheté les hommes.

d) Cette doctrine est niée par les manichéens et par tous ceux qui nient que Dieu se soit vraiment incarné. Pareillement pour les pélagiens qui nient le péché originel et enseignent que les hommes peuvent parvenir au salut par leurs propres forces naturelles. De même pour les sociniens qui disent que le Christ nous a montré la voie du salut seulement par la doctrine et l’exemple. Les anciens protestants admettaient cette doctrine, mais les rationalistes modernes la combattent vivement, et surtout Ritschl, et ses disciples, et parmi eux, le français E. (sic) Sabatier. Du reste, parce qu’ils déforment d’abord la doctrine, en vue de la combattre, [et] qu’ils l’attaquent ensuite, une fois qu’elle est travestie, il est à peine besoin de considérer leurs bruyantes protestations. En cela, il est plus étonnant que même certains théologiens catholiques, par crainte de ces protestations, s’appliquent à modifier tout du moins leur façon de parler et conseillent qu’il faut dire : Le Christ souffrant nous a racheté, [et] non pas : le Christ nous a racheté par sa passion. Mais il faut tenir fermement à la façon de parler que les Écriture, les Pères, les théologiens, les conciles ont sanctionnée : le Christ nous a racheté par sa passion, son sang, sa mort.

135. Preuve 1. Tirée des Écritures.

a) En Isaïe, au chapitre 53, se trouve une prophétie sur le Christ souffrant, comme on le constate dans le Nouveau Testament (Matthieu 8, 17 ; Marc 15, 28 ; Luc 22, 37 ; Actes 8, 32 et suiv. ; 1 Pierre, 2, 22 et suiv.). Or, dans cette prophétie, il est dit que le Christ a pris sur Lui les peines des pécheurs, et qu’Il nous a ainsi réconciliés avec Dieu. « Il a vraiment lui-même supporté nos maladies, et il a lui-même porté nos douleurs. (…) Et il a lui-même été blessé à cause de nos iniquités, il a été brisé à cause de nos fautes, le châtiment [qui conduit à] notre paix est sur lui, et par ses blessures, nous sommes guéris. (…) Et le Seigneur a fait reposer sur lui l’iniquité de nous tous. (…) S’il abandonne sa vie pour le péché, il verra une longue descendance. (…) Par sa science, le juste, mon serviteur en justifiera lui-même beaucoup, et il portera leurs iniquités. C’est pourquoi Je lui donnerai une grande multitude pour partage, et il distribuera les dépouilles des forts. » On ne peut exprimer plus clairement l’idée de satisfaction vicaire.

b) Dans le Nouveau Testament le Christ dit de Lui-même : « Le Fils de l’homme vient (…) donner sa vie en rachat pour la multitude (Matthieu 20, 28 ; Marc 10, 45). « Le rachat, λυτρον [lutron] est la rançon par laquelle quelqu’un achète sa liberté ou sa vie (cf. Exode 21, 29 et suiv. ; 30, 12 ; Nombres 35, 30 et suiv., etc.). Donc le Christ dit qu’Il donnera sa vie, ce par quoi l’homme serait racheté de l’esclavage et de la mort spirituelle. Et cela, Il le fait par obéissance au commandement du Père. « Moi, je suis le bon pasteur. Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis (…) À cause de cela, le Père M’aime, parce que Moi, je dépose ma vie, pour la reprendre à nouveau (…) Ce commandement, je l’ai reçu de Mon Père » (Jean 10, 11 et suiv. ; 17 et suiv.). Et au sujet de Son sang, il dit : « Ceci est mon sang, celui de la nouvelle alliance, qui sera versé pour la multitude en rémission des péchés « (Matthieu 26, 28 ; Marc 12, 24 ; Luc 22, 20). Par conséquent, le Christ est désigné [comme] l’ « agneau de Dieu qui porte/enlève le péché du monde » (Jean 1, 29) ; « Il est Lui-même propitiation [=moyen d’apaisement : ἱλασμός (hilasmos) ; propitiatio] pour nos péchés, non pas les nôtres seulement, mais également pour [ceux] du monde entier » (1 Jean 2, 2). Il s’est donné lui-même comme ἀντίλυτρον [antilutron : prix, rançon] pour tous (1 Timothée 2, 5 et suiv.]. D’autre part, on dit des croyants qu’ils sont achetés au prix du sang du Christ. « Vous avez été achetés à grand prix » (1 Corinthiens 6, 20 ; cf. 7, 23). « Vous n’avez pas été rachetés par des choses corruptibles, par de l’or ou de l’argent (…) mais par le sang précieux du Christ comme celui d’un agneau sans tâche » (1 Pierre 1, 18 et suiv.). C’est pourquoi « nous avons le rachat par Son sang » (Colossiens 1, 14 ; cf. 1, 20-22). « Nous sommes réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils » (Romains 5, 10). Par ces attestations, et par de nombreuses autres, il est clairement enseigné que le Christ a pris sur lui la peine due pour les péchés, et qu’il nous a réconcilié avec Dieu par sa passion et sa mort.

136. Preuve 2. Tirée de la tradition.

S. Clément de Rome : « Considérons d’un regard attentif le sang du Christ, et reconnaissons combien est Il précieux pour son Dieu et Père, [ce sang] qui, répandu pour notre notre salut, a obtenu la grâce du repentir pour le monde entier » (Première épître aux Corinthiens 7, 4 ; cf. 12, 7 ; 49, 6).

S. Basile : « L’on a trouvé quelque chose de très adéquat, dans le même temps, pour tous les hommes car il est donné comme prix du rachat de notre âme, c’est le sang saint et précieux de notre Seigneur Jésus Christ qu’Il a versé pour nous tous. ([Homilia n. 10] In Psalmum 48, n. 4)

S. Jean Chrysostome : Le Christ « agissant de même qu’un innocent s’il délivrait quelque individu soumis à la mort, en voulant mourir volontairement à la place de ce condamné ; ainsi a fait le Christ. En effet, alors que le Christ n’était pas assujetti à la malédiction, Il la prise sur lui pour tous afin que tous soient libérés par Lui. » (Commentarius in epistolam ad Galatas 3, 13)

S. Ambroise [de Milan] : Le Christ, « parce qu’Il a pris sur Lui nos péchés, a été nommé péché, (…) parce qu’Il a pris sur Lui-même notre malédiction. [(…) ; quand, pour ce qui est du péché qu’Il n’avait pas, il est écrit qu’Il a été fait péché, ce n’est pas [qu’Il a été fait] péché en essence et en acte, vu qu’Il a été fait à l’image de la chair du péché : mais [c’est que], afin de crucifier notre péché dans sa chair, dès lors, Il a pris sur Lui de porter, pour nous, le corps charnel du péché, assujetti aux infirmités » (De Incarnatione Domini sacramento, chap. 6, n. 60).

S. Jérôme : « Ce que [nous, en effet], devions supporter pour nos crimes, Lui l’a souffert pour nous, apaisant, par le sang de sa croix, les choses qui sont et sur terre, et dans les cieux. [Il est lui-même, en effet, notre paix, qui a fait des deux un seul.] (Commentarius In Isaiam 53, 5 et suiv.)

S. Augustin : « Le Christ, [étant] sans péché, a porté notre peine/punition/châtiment, pour nous délivrer, par là, de notre péché et, en plus, mettre un terme à notre peine. » (Contra Faustum, livre 14, chap. 4)

Et ainsi de suite, de nombreux autres Pères. Semblable est la doctrine unanime des théologiens (cf. supra n. 134 b et Suarez, De incarnatione, dispute 4, section 3).

S. Thomas ajoute que cette manière de délivrer l’homme a été convenable au plus haut point. En effet, de cette façon, a) l’homme a pris connaissance, de la meilleure manière, de l’amour de Dieu qui a souffert tant de choses pour lui ; b) il reçoit l’exemple des plus grandes vertus que l’on peut clairement distinguer dans la passion du Christ ; c) il est détourné avec crainte du péché qu’une telle peine devait acquitter/expier ; d) il a pris conscience de sa propre dignité parce qu’il a été racheté à si grand prix (Somme théologique, 3e partie, question 46, article 3). En outre, il faut remarquer que la passion et la mort du Christ sont la cause de notre salut non seulement par mode de satisfaction et de rachat mais également par mode de mérite et de sacrifice (S. Thomas, ibid., 3e partie, question 48, article 1 et suiv.). Nous avons évoqué la satisfaction et la rédemption ; nous parlerons par la suite du mérite et du sacrifice.

Le Concile d’Éphèse, au canon 10, a défini que le Christ a offert lui-même le sacrifice pour nos péchés, et il ajoute : Si quelqu’un dit « qu’Il a lui-même offert l’offrande pour Lui et non pas plutôt pour nous seuls (en effet Il n’avait pas besoin d’offrande celui qui ne connaissait pas du tout le péché), qu’il soit anathème. » (Denzinger n. 261/122).

Concile de Latran IV : Le Christ «  a souffert et mort sur le bois de la croix pour le salut du genre humain. » (Denzinger n. 801/429)

Concile de Florence, dans le Décret pour les Jacobites : le Christ « a terrassé à Lui seul l’ennemi du genre humain en détruisant, par Sa mort, nos péchés. » (Denzinger n. 1347/711)

Le Concile de Trente, dans la session 5, au canon 3, enseigne que le péché n’est enlevé par un autre remède « que celui du mérite d’un seul médiateur, notre Seigneur Jésus-Christ qui nous a réconcilié avec Dieu en son sang » ; dans la session 6, au chapitre 2, il enseigne que le Christ est, en son sang, le propitiateur pour nos péchés (citation de Romains 3, 25) ; dans la session 6, au chapitre 7 : la cause méritoire de notre justification est « Jésus-Christ qui, alors que nous étions ennemis” [cf. Romains 5, 10] , à cause de l’excessive charité par laquelle il nous a aimé” [cf. Éphésiens 2, 4], nous a mérité la justification par sa très sainte passion sur le bois de la croix, et a satisfait [= a donné satisfaction en expiant] pour nous à Dieu le Père » (Denzinger n. 1513/790, 1522/794, 1529/799)

Par conséquent, il n’est pas possible de douter que, selon la doctrine catholique, le Christ a satisfait pour les péchés des hommes en souffrant et en mourant.

137. Objection I.

[Majeure] Personne ne peut satisfaire lui-même à soi-même.

[Mineure] Or il fallait satisfaire aussi à la seconde personne de la sacro-sainte Trinité.

[Conséquence] Donc cette personne ne pouvait satisfaire pour les péchés.

Réponse : Je distingue la majeure : Quelqu’un, en qualité de personne, et possédant une seule nature, ne peut satisfaire à lui-même, je concède la majeure ; et celui qui, certes, est une personne, mais possède deux natures rationnelles, ne peut satisfaire à lui-même selon une [des deux ] natures, en ayant été offensé selon l’autre, je nie la majeure.

Je concède la mineure.

Je distingue la conséquence : Le Christ n’a pas pu faire d’actes satisfactoires selon la divinité, je concède la conséquence ; ni selon l’humanité, je nie la conséquence.

[En effet], la satisfaction, en termes propres, est procurée à Dieu par la volonté, et par d’autres actes dans la mesure où ils procèdent de la volonté. Or la volonté humaine du Christ est autre que la volonté divine. Par conséquent, cette volonté a pu se soumettre à Dieu afin de satisfaire pour les péchés et, à cette fin, subir la passion et la mort.

La personnalité du Verbe, en ce qui concerne les actions humaines qui sont les siennes et qu’elle doit engager, a seulement pour condition de ne pas tirer la diversité de ces actions des actions divines. Par conséquent, la distinction requise pour satisfaire est préservée.

En outre, le Christ est une double personne morale, en tant que Dieu et en tant que Représentant du genre humain. Or il peut se faire que quelqu’un s’achète, en tant que personne publique quelque chose à lui-même, en tant que personne privée ; ou qu’il reçoive de lui-même, en tant que personne privée, des revenus qu’il a réunis en tant que personne publique. Ce qui s’est fait dans le Christ est analogue, Lui qui, en tant que Tête du genre humain, s’est acquitté envers Dieu, et également envers Lui-même, en tant que Dieu, de ce que les hommes devaient à Dieu. Cela, de toute façon, n’aurait pu se faire si le Christ n’avait pas été en même temps homme ; en effet, en tant que Dieu, Il ne satisfaisait pas, mais Il rendait moralement dignes les actes faits selon sa nature humaine.

138. Objection II.

[Majeure] Il est injuste et cruel de punir un innocent à la place (pro) d’un coupable.

[Mineure] Or le Christ était innocent.

[Conséquence] Par conséquent, Il ne devait pas être puni à la place (pro) des hommes coupables.

Réponse. Passe le tout, parce que le Christ, à proprement parler, n’a pas été puni, bien que, quelquefois, certains Pères parlent ainsi avec un sens moins précis. En effet, la peine proprement dite n’est infligée qu’à un homme coupable. Or les souffrances et les autres maux physiques peuvent également être supportés par un innocent pour une autre fin, comme cela arrive fréquemment parmi les hommes. Mais si « peine » est prise au sens large pour « pénalité », il faut ainsi distinguer l’objection.

Je distingue la majeure : Il est injuste et cruel de contraindre un innocent à satisfaire pour un coupable contre sa volonté, je concède la majeure ; un innocent ne peut pas volontairement procurer une satisfaction pour un coupable, je nie la majeure.

Je concède la mineure.

Je distingue la conséquence : Le Christ ne devait pas être contraint contre sa volonté à satisfaire pour les hommes, je concède la conséquence ; le Christ ne devait pas volontairement satisfaire pour les hommes, je nie la conséquence.

Et par cette volonté soumise du Christ, Dieu a pu donner au Christ homme le commandement de satisfaire pour les hommes. Ensuite, il faut vraiment relever la chose suivante : Dieu n’a pas tué le Christ, et le Christ ne s’est pas tué Lui-même, mais ce sont ses ennemis qui L’ont tué ; or Dieu a permis cela et le Christ a accepté la mort, afin que, de cette façon, Il satisfît pour les péchés des hommes, et ainsi, par la Providence divine, d’un mal permis, Il a fait un plus grand bien (cf. S. Thomas, op. cit., 3e partie, question 47, articles 1-3).

139. Objection III.

[Majeure] Si le Christ a satisfait pour les hommes, il ne fallait pas imposer aux hommes eux-mêmes les maux qui constituent la peine du péché originel, parce que le droit d’exiger la peine est suspendu lorsque la satisfaction a été procurée et acceptée.

[Mineure] Or on a imposé aux hommes les maux qui constituent la peine du péché originel.

[Conséquence] Par conséquent, le Christ n’a pas satisfait pour le péché originel.

Réponse. Je distingue la majeure : Si le Christ a satisfait, les hommes qui ne sont pas nés de nouveau du Christ, ne sont pas davantage soumis à la peine due pour le péché original, je nie la majeure ; ceux qui sont nés de nouveau du Christ [ne sont pas davantage soumis à la peine due pour le péché original], je concède la majeure.

Je distingue la mineure : Ceux qui ne sont pas nés de nouveau sont punis pour le péché originel, je concède la mineure ; ceux qui sont nés de nouveau [sont punis pour le péché originel], je nie la mineure.

Et je nie la conséquence : Il est évident que le Christ a, certes, satisfait pour tous de manière suffisante. Mais cette satisfaction est appliquée à tout un chacun dans la mesure où ils deviennent, par le baptême, les membres du Christ (Marc 16, 16 ; Jean 3, 5). En effet, « l’effet de ce sacrement est la remise de toute faute originelle et actuelle, et également de toute peine due pour la faute elle-même » (Concile de Florence, Décret pour les Arméniens ; Denzinger n. 1316/696). Les malheurs de la vie, comme les souffrances et la mort, sont conservés chez les justes, non comme peine des péchés remis par le baptême, mais afin que les membres soient formés sur le modèle du Christ Tête, et afin, qu’avec Lui, par leur endurance, ils méritent une couronne plus éminente dans le Ciel. Ceux qui, de fait, pèchent de nouveau gravement après le première justification, doivent, selon le juste jugement de Dieu, supporter d’autres peines qui, cependant, ne tire leur force de satisfaire pour les péchés que de la satisfaction du Christ (Denzinger, 1691/904 ; S. Thomas, op. cit., 3e partie, question 49, article 3 ; Ferdinand Aloys Stentrup, Praelectiones dogmaticae de Verbo Incarnato. Pars altera : Soteriologia, Innsbrück, Rauch, 1884, thèse 8).

De fait, les objections que A. Sabatier et les autres rationalistes soulèvent, sont si déplorables qu’ils n’est pas besoin de répondre, comme quand ils disent que, selon la doctrine catholique, Dieu ne pouvait remettre le péché par pure charité, mais que [sa] colère devait nécessairement être apaisée par le sang et la mort, que Dieu est considéré comme un noble qui ne veut pas tolérer que son honneur outragé reste sans vengeance ; beaucoup d’autres choses semblables non moins sottes qui, si elles sont, de fait, jugées valables par cet homme savant, ne méritent pas tant la réfutation que la pitié. Voyez cela, si vous voulez, chez Labauche, Leçons de théologie dogmatique, t. I, p. 340 et suiv.


Scholastique [partie de la théologie qui discute des questions de théologie par la raison et les arguments]. De l’acceptation et de la valeur de la satisfaction du Christ.

140. a) La satisfaction du Christ, pour qu’elle soit efficace pour les hommes en acte second, doit être acceptée par Dieu. En effet, la peine pour le péché grave établie par Dieu est la damnation éternelle. Or, personne sinon Dieu ne peut changer cette peine en une autre. En outre, la satisfaction procurée par le Christ est quelque chose d’extérieur au péché, qui ne le rend pas juste d’une façon immédiate mais constitue une raison pour Dieu de justifier Lui-même l’homme intérieurement ; par conséquent, cela requérait l’acceptation de la part de Dieu. Or Dieu a établi le mode par lequel Il veut accepter la satisfaction et l’appliquer aux hommes. À ce mode appartient le fait que les actions satisfactoires, quoique n’importe laquelle d’entre elle fût suffisante pour racheter le genre humain, devaient être cependant accomplies par la mort du Christ. Par conséquent, on dit que nous sommes rachetés par la mort du Christ (Romains 5, 10 ; Hébreux 2, 14). Or l’acceptation, de la part de Dieu, n’est rien d’autre que la décision de l’Incarnation et de la mort du Christ ; en effet, par cela même que Dieu a envoyé le Christ dans ce but, Il a accepté sa satisfaction. Mais parce que l’acceptation n’ajoute rien à la valeur interne de la satisfaction, les nominalistes, comme [Gabriel] Biel (Résumé et commentaire des quatre Livres des sentences, in 3, distinction, 19, question 1, conclusion 3), et la plupart des scotistes [disciple de Jean Duns Scot], concluent injustement de cette nécessité que la satisfaction du Christ n’était pas en soi condigne pour effacer les péchés de tous les hommes.

b) C’est une opinion très commune aux théologiens que de dire que la satisfaction du Christ est condigne et surabondante (cf. S Thomas, op. cit., 3e partie, question 48, article 2 ; Suarez, De Incarnatione, dispute 4, section 4, numero 11 et suiv.). Dans les Saintes Écritures, le sang du Christ est appelé τιμή [timè] (1 Corinthiens 6, 20 ; 1 Pierre 1, 18 et suiv.). Or τιμή est un prix condigne. C’est pourquoi au chap. 10 de l’épître aux Hébreux, on montre que les hommes ont pu être sanctifiés par le seul sacrifice que le Christ a offert sur la croix, et non par les sacrifices de l’Ancien Testament. J’ajoute que Dieu a pu même accepter ces sacrifices pour remettre les péchés ; par conséquent, la différence essentielle entre les sacrifices de l’Ancien Testament et le sacrifice du Christ n’est pas dans l’acceptation mais dans la valeur interne, ce qui est également évident dans l’exposé de S. Paul.

Bien mieux, la S[ainte] Écriture enseigne que la satisfaction du Christ est surabondante. « Le don n’est pas comme la faute ; si, en effet, beaucoup sont morts par la faute d’un seul, la grâce de Dieu et le don [fait] dans la grâce d’un seul homme, Jésus-Christ, ont abondé plus encore chez une multitude. Et le don n’est pas comme le péché [advenu] par un seul ; en effet, le jugement [prononcé sur] un seul [péché] [aboutit], certes, à la condamnation, mais la grâce [appliquée à] une multitude de fautes [aboutit] à la justification. Si, en effet, par la faute d’un seul, la mort a régné par ce seul [homme], ceux qui reçoivent l’abondance de la grâce, du don et de la justice, régneront plus encore dans la vie par un seul, Jésus-Christ » (Romains 5, 15 et suiv.). Telle est donc l’excellence de l’action du Christ, car, dans la satisfaction du Christ, la puissance pour sauver était beaucoup plus grande que celle pour perdre dans le péché d’Adam.

Semblable est la doctrine des saints Pères.

S. Prosper [d’Aquitaine] : « Contre la blessure du péché originel (…) la mort du Fils de Dieu est un remède vrai, puissant et unique (…). Parce que, pour ce qui est de l’importance et de la puissance du prix [payé], pour ce qui est de la seule excuse du genre humain, le sang du Christ vaut le rachat du monde entier (Responsiones ad capitula objectionum Vincentianarum, livre 1, chapitre 1)

S. Cyrille de Jérusalem : « L’iniquité des péchés n’était pas aussi grande que la justice de Celui qui mourrait pour notre grâce » (Catechesis 13, De Christo crucifixo et sepulto, n. 33).

S. Jean Chrysosotome : « Le Christ a payé bien davantage que ce que nous devions, combien la mer a-t-elle prodigieusement dépassé la petite goutte ! » (Commentarius in epistolam ad Romanos, homélie 10, n. 2).

Bien mieux, selon l’opinion de nombreux théologiens (contredisant les scotistes), la satisfaction du Christ est infinie en raison de sa dignité morale, parce que la dignité de la satisfaction est d’autant plus grande que l’est la dignité de la personne qui satisfait. Or, la personne du Christ est d’une dignité infinie ; donc sa satisfaction l’est également. En effet, bien que les actions humaines du Christ soient en elles-mêmes finies, elles reçoivent une dignité morale de la personne du Christ et sont déifiées par Lui ; certes, cette dignité se trouve en ses actions humaines par mode de participation, et elle s’ajoute à elles de l’extérieur, elle ne les constitue pas intérieurement. Par suite, une seule action du Christ a autant de valeur pour satisfaire que toutes [ensemble], bien que [ce soit] seulement toutes en même temps qui, rendues parfaites par la mort, ont été offertes et acceptées en vue de la satisfaction. Pour ce qui touche aux actions elles-mêmes, elles se rapportent à bien d’autres vertus morales et, en ce sens, leur bonté morale est variée.

Lorsque le Christ s’offrait Lui-même, une personne infinie offrait une chose infiniment digne. Néanmoins, la raison de dignité se trouve davantage du côté de la personne offrante ; en effet, si la personne offrante était finie, la satisfaction ne serait pas purement et simplement infinie en raison de la chose offerte infinie. Ainsi le sacrifice de la messe, dans la mesure où il est offert par un prêtre humain, ne possède pas une valeur infinie (cf. Suarez, op. cit., dispute 4, section 4, n. 29). Et par conséquent, ce n’est pas parce que le prix offert est infini que la satisfaction est infinie, parce que la satisfaction est évaluée en fonction de la dignité de celui qui satisfait ; « et on dit de la satisfaction elle-même par laquelle quelqu’un satisfait soit pour lui-même, soit pour un autre, [qu’elle est] un certain prix par lequel [cette personne] se rachète elle-même ou bien l’autre, du péché et de la peine » (S. Thomas, op. cit., 3e partie, question 48, article 4).

Clément VI disait à ce propos : le Christ a répandu pour nous tous Son sang. « [En effet, Il nous a rachetés, non avec l'or et l'argent périssables, mais avec Son propre sang, [le sang] précieux d'un agneau pur et sans tache (1 Pierre 1, 18) ; [ce sang], on sait que l’Innocent immolé sur l'autel du sacrifice, n’en a pas versé qu’une petite goutte qui, cependant, à cause de l’union au Verbe aurait suffi pour le rachat de tout le genre humain, mais [Il l’a versé] abondamment comme par écoulement, de telle façon que « de la plante du pied jusqu’au sommet de la tête, on ne trouvait en Lui plus rien de sain » (cf. Isaïe 1, 6).] Par suite, donc, afin que la miséricorde d’un tel épanchement ne soit pas rendu inutile, vaine ou superflue, quel grand trésor a-t-Il acquis à l’Église militante, car le tendre Père voulait le rassembler pour Ses fils, afin qu’ainsi “appartiennent aux hommes un trésor infini par lequel ceux qui en font usage ont part à l’amitié de Dieu” (Sagesse 7, 14) » (Denzinger n. 1025/550).

d) Pareillement, de nombreux théologiens enseignent que le Christ, en un certain sens, a vraiment satisfait en rigueur de justice, de telle sorte que Dieu, au titre de la justice, devait accepter cette satisfaction et, à cause d’elle, libérer les hommes du péché. Certes, il ne s’agit pas de justice commutative proprement dite [=justice qui règle l'équité des échanges], comme si Dieu avait reçu quelque chose et devait rendre une chose équivalente, mais il s’agit de justice distributive [=justice qui répartit les biens et les peines selon les mérites] selon laquelle Dieu, à cause de la satisfaction et du mérite du seul Christ, a distribué les biens surnaturels (cf. Suarez, op. cit., dispute 4, section 4, n. 62 et suiv.). En effet, étant supposée la promesse d’accepter la satisfaction et les mérites du Christ à cette fin, Dieu se devait [de faire en sorte] que cette disposition soit mise à exécution. Et parce que Dieu n’a pas simplement promis quelque chose mais, dans la mesure où Il a d’abord demandé une satisfaction condigne, [la satisfaction] est considérée, au-delà du seul titre de la parole donnée, comme une vraie raison de justice.

Or, on dit que la satisfaction du Christ est [faite] en rigueur de justice dans la mesure où le Christ a offert à Dieu une satisfaction sur ses biens propres, [biens] dont il avait la parfaite possession. Certes, l’Incarnation elle-même était l’œuvre de la pure miséricorde de Dieu, que personne n’a pu mériter, mais le Verbe incarné a eu la pleine propriété de ses actes humains et, par ses actes, Il n’a pas moins satisfait que s’ils étaient les actes d’une personne infinie distincte de Dieu. Un autre homme juste satisfait par des actions faites [sous l’influence ] de la grâce et, par conséquent, non par rigueur de justice ; mais le Christ a satisfait par des actions qui étaient de valeur infinie non [sous l’influence] de quelque grâce mais par la dignité naturelle de la personne. Même si ces actes étaient dus à Dieu à d’autres titres, ces titres laissaient intacte la parfaite propriété du Christ. Or, c’est de cette parfaite propriété que dépend la raison de justice, étant supposée l’acceptation de Dieu. Dieu a dit en quelque sorte : Si Tu procures une satisfaction condigne, Moi, Je remettrai les péchés. Le Christ a procuré une satisfaction condigne ; donc Dieu, par rigueur de justice, remet les péchés. Il existe certaines théologiens qui nient cela. Mais ceux-ci, quant à la rigueur de justice, demandent quelque chose qui n’est pas nécessaire. Par suite, toute la discussion se situe plus au niveau de la façon de parler (cf. [Johannes Baptist] Franzelin, [Tractatus] de Verbo Incarnato, thèse 47 ; Stentrup, op. cit., thèse 12).


Référence

Christian Pesch, s.j. [de la Compagnie de Jésus c’est-à-dire jésuite], Compendium theologiae dogmaticae, t. III : De Verbo Incarnato ; de Beata Virgine Maria et de cultu sanctorum ; de gratia ; de virtutibus theologicis, 5e édition, Herder & Co., Fribourg-en-Brisgau, 1935, p. 73-81. 


La traduction, à partir du texte latin, est le fait de l'auteur de ce blogue.