ANATOMIE ET FONCTION DU PRÉPUCE,
L'INSTRUMENT DE L'AUTOSEXUALITÉ
I - LE PRÉPUCE, COMME LE CLITORIS, EST L'INSTRUMENT PRIVILÉGIÉ DE L'AUTOSEXUALITÉ
Les anciennes cultures africaines ne fantasmaient ni ne métaphorisaient pas en affirmant que le prépuce est la partie féminine de l'homme. Elles firent œuvre scientifique d'observation empirique. En effet, l'école anatomique nord-américaine a découvert la base histologique de ce savoir antique.
Microscope en mains, les chercheurs se sont aperçus que le clitoris et le prépuce sont des zones érogènes spécifiques, avec une fonction sexuelle précise. Celle du clitoris est bien connue, nous n'y reviendrons pas. Celle du prépuce est restée plus obscure.
Cold et McGrath (1) suggèrent que le prépuce, présent chez les primates depuis 65 millions d'années, a connu chez l'homme une évolution particulièrement achevée. A la différence des singes supérieurs, chez lesquels l'acte sexuel est extrêmement bref, du fait de la forte innervation érogène du gland, l'homme possède une innervation de l'anneau de l'extrémité prépucielle décuplée par rapport à celle de la couronne du gland (1, 2) ; le reste de ce dernier étant, selon Halata et Munger (2), « protopathiquement » insensible. Cependant, ceux qui penseraient qu'en supprimant le prépuce, on pourrait faire encore durer le plaisir, sautent aux conclusions, faute sans doute de savoir conclure, au bon moment.
Le prépuce est donc, plus encore que le gland, la zone érogène majeure de l'homme. Fait pour la caresse, son épiderme extérieur est érogène à sec sans irritation (il n'en est pas de même du gland, d'usage différent). Il est doté de tissus particulièrement étirables et est beaucoup plus abondamment et qualitativement pourvu que le gland en terminaisons nerveuses érogènes et tactiles (1, 2, 3) qui en font, à la différence des lèvres ou de l'anus, une surface spécifiquement érogène (3, 4, 5) (par frottement et étirement sans besoin de lubrification), complémentaire de celle du gland (par frottement sous condition de lubrification).
L'amputation du prépuce (circoncision) prive l'homme des 2/3 de la surface la plus érogène du corps. Le prépuce contient 116 terminaisons nerveuses par cm2 (6) et la circoncision détruit environ 90-120 cm2 (2 fois 4,5-5 cm sur 10-12 cm de diamètre). La perte est donc de plus de 10 000 terminaisons nerveuses. Mais ce chiffre est sous-estimé : Bazett et ses collaborateurs, dans leur étude, ont omis certains types de terminaisons nerveuses présents dans le prépuce (1).
Cold et McGrath (1) ont observé que les terminaisons nerveuses "encapsulées" sont spécifiquement érogènes. Elles doivent être distinguées des terminaisons nerveuses purement sensorielles. Situées dans l'anneau prépuciel et la couronne du gland, elles leur donnent un rôle majeur dans la sexualité. Or elles sont 10 fois plus nombreuses dans l'anneau. Ce dernier est ainsi la couronne de la couronne. Les amputés du prépuce ont perdu 9/10èmes de leurs plus précieuses cellules nerveuses sexuelles !
Le mécanisme du prépuce : manchon, paupière ou bas ?
Le prépuce joue le rôle d'une paupière en forme de manchon, mais il n'est ni l'une ni l'autre puisqu'il ne glisse pas. Il est en réalité un store à double face, se déroulant sur lui-même par un mécanisme unique, redoublé par celui, interne, de l' anneau. En fin de course, il devient un simple bas coulissant sur la hampe.
L' « anneau » et les anneaux élastiques.
L'anneau qui resserre le prépuce après l'extrémité du gland est irrémédiablement détruit par la circoncision. Assurant le rôle des cordons d'une bourse, il contient les anneaux élastiques découverts par les pionniers de l'histologie sexuelle. Ces anneaux, semblables à ceux du haut d'une chaussette, sont formés de cellules de chair tout particulièrement étirable, entrelacées avec une profusion de divers types de ces terminaisons nerveuses érogènes encapsulées. Instrument spécifique de l'autosexualité qui en use comme d'un accordéon d'amour, l'anneau, incluant le frein, est la partie la plus érogène de l'homme. L'anneau vient d'abord, à la sollicitation, masser étroitement le gland sur toute sa longueur. C'est ensuite seulement qu'il soutient la comparaison avec l'accordéon. Celles qui aiment s'attarder aux préludes amoureux, si elles ont l'occasion de comparer, se rendent vite compte de l'énormité de la perte des circoncis, de la grande pauvreté de leurs sensations.
II - LA DEUXIÈME FONCTION DU PRÉPUCE, FONCTION PROTECTRICE
À la différence du clitoris, le prépuce a une deuxième fonction : moitié peau, moitié muqueuse, il n'est pas une peau mais une paupière protectrice, très richement vascularisée, comportant une musculation et des glandes lubrifiantes, antimicrobiennes et antivirales (3, 4, 5). Débordant le gland chez l'enfant et souvent chez l'adulte, il le maintient humide et protège sa délicate muqueuse interne, tout particulièrement pendant la période des langes de l'enfance (7). Le créateur a pensé à tout : le prépuce ne devient rétractile que parfois très tard dans l'adolescence - forcer les choses serait nocif.
L'ablation détruit donc la paupière du plus sensible des organes du toucher masculin. La muqueuse fine, lisse et soyeuse du gland, devient une peau dix fois plus épaisse (8), sèche, mate. Elle n'est plus protégée du frottement des vêtements, source d'irritation permanente, à l'opposé du confort naturel de l'indispensable fourreau, chaud et élastique. D'après une étude récente (9), le gland des entiers est de 25 à 30% plus sensitif.
Première conséquence, les circoncis ont besoin de stimulations fortes : ils ont plus fréquemment recours aux pratiques sexuelles marginales : sexualité anale ou orale, homophilie (5, 8). L'amour est une journée ensoleillée, avec feu d'artifice le soir. Sans le prépuce, le feu d'artifice est tiré mais le soleil est bien pâle. Mais surtout, l'amour est prévu muqueuse contre muqueuse - certains y voient une promesse d'échanges subtils - et non peau contre muqueuse : ce n'est pas un exercice de gymnastique ou de massage, mais une démonstration de tendresse.
Etats-Unis : 52% des 1 290 sujets, pris au hasard, d'une étude, âgés de 40 à 70 ans (11). Le succès du Viagra aux Etats-Unis, son échec relatif en Europe, n'ont pas d'autre explication. Nous pouvons prédire qu'il se vendra bien chez les Africains et les musulmans aisés.
Troisième conséquence, les « restaurateurs » de leur prépuce ont suivi la voie ouverte par les athlètes juifs de l'antiquité, avant l'instauration de la peri'ah (circoncision poussée, incluant l'arrachement de la muqueuse interne du prépuce). Ils sont maintenant nombreux aux USA et le mouvement gagne Europe. Leurs patients efforts (trois ans de pénibles étirements), l'immense satisfaction qu'ils éprouvent à récupérer la sensibilité de leur gland, sont la meilleure démonstration de la nocivité sexuelle de la circoncision.
CONCLUSIONS
Ceux qui ont été mutilés dans l'enfance se plaignent rarement : ils ne savent pas ce qu'ils ont perdu. Pour certains (10% des cas (13)), l'opération a entraîné la mort ou divers autres accidents (hémorragies, infections, blessures involontaires, inconfort voire douleur dans l'érection, déformation du pénis, sténose du méat urinaire, nécrose, etc (3, 7, 8, 14). Nombre d'adultes, circoncis le plus souvent avant leur mariage, regrettent amèrement la perte de sensibilité et de plaisir. Beaucoup préfèrent se taire.
D'autres ont été profondément atteints dans leur psychisme : traumatisme (10, 12, 15, 16), stress post-traumatique (10, 11, 15, 16), névrose (17), psychose paranoïaque (18), et d'autant plus profondément que l'opération a eu lieu plus jeune (11, 15, 19, 20, 21).
On est en train d'abandonner l'argument prophylactique : les médecins recommandent plutôt l'hygiène que le nettoyage par le vide (22, 23, 24, (*)). La circoncision n'est plus utilisée pour le traitement de l'éjaculation prématurée. Le « phimosis » est rare et régresse spontanément : de 9% de cas à 6-7 ans à 2% à 16-17 ans (25). Ensuite, dans la moitié des cas, la plastie ou des incisions longitudinales permettent d'éviter la perte de la précieuse paupière.
L'anatomie et la médecine modernes confirment le savoir antique des cultures africaines mais tirent la conclusion opposée. Le prépuce, mini-vulve portable, est bien la partie féminine de l'homme, avec la même fonction que le clitoris, celle d'outil érotique de l'autosexualité et des préludes amoureux. Comme le clitoris, il a un rôle relativement moindre pendant le coït au profit de la caresse mutuelle des muqueuses de l'amour.
Le prépuce est la manne du célibataire et la consolation du veuf. Personne ne songerait à exciser le clitoris, personne ne doit mutiler l'homme du précieux instrument qui donne une assurance de fidélité aux couples séparés. La circoncision, importante perte sèche érogène, atteint gravement la fonction sexuelle.
Seule la force d'un conservatisme accablant, de l'habitude, de l'ignorance et de la croyance aveugle fait barrière à l'abolition de la circoncision rituelle. En ce qui concerne la médecine, la circoncision est risquée pour le chirurgien, désolante pour le sexologue, catastrophique pour le psychiatre. Ceux qui ont encore des doutes doivent s'abstenir.
Sigismond (*)
Notes :
(*) Sigismond, Letter to the editor, In BJU International, 2003, 91 (4), p. 429.
(1) Cold K., McGrath C., « Anatomy and histology of the penile and clitoral prepuce in primates. An evolutionary perspective of the specialised sensory tissue of the external genitalia. », In Male and female circumcision, Denniston G. Hodges F. and Milos M. eds. Kluwer academic/Plenum publishers, New York, 1999. (cirp.org/library/anatomy/cold-mcgrath).
(2) Halata Z., Munger B., « The neuroanatomical basis for the protopathic sensibility of the human glans penis », In Brain research, 1986, 371, p. 205-320. (cirp.org/library/anatomy/halata).
(3) Fleiss P., The case against circumcision, In Mothering, Winter, 1997, p. 36-45. (cirp.org/news/Mothering1977).
(4) National organisation of circumcision information resource centers, The penis and foreskin: prepucial anatomy and sexual function, San Anselmo. (cirp.org/library/anatomy).
(5) Fleiss P., Hodges F., Van Howe R., Immunological functions of the human prepuce. Sexually transmitted infections, 1998, 74, p. 364-67. (cirp.org/disease/STD/fleiss3).
(6) Bazett H., McGlone B., Williams R., Lufkin H., « Depth, distribution and probable identification in the prepuce of sensory end-organs concerned in sensations of temperature and touch thermometric conductivity », In Archives of neurology and psychiatry, 1932, 27 (3), p. 517. (cirp.org/library/anatomy/bazett).
(7) Leitch I., « Circumcision - a continuing enigma », In Australian paediatric journal, 1970, 6, p. 59-65. (cirp.org/library/general/leich1).
(8) Foley J., « The unkindest cut of all », In Fact magazine, 1966, 3 (4). (cirp.org/library/news/1966.07_Foley).
(9) National organization of circumcision information resource centers, Men scarred by circumcision, 7 décembre 2000. (cirp.org/ news/nocirc12-7-00).
(10) Boyle J., Goldman R., Svoboda J., Fernandez E., « Male circumcision : pain, trauma and psychosexual sequelae », In J health psychology, 2002, 7 (3), p. 329-43. (cirp.org/library/psych/boyle6).
(11) Goldman R., « The psychological impact of circumcision », In BJU International, 1999, 83 (suppl. 1), p. 93-103. (cirp.org/library/psych/goldman1).
(12) Glover E., « The "screening" function of traumatic memories », In International journal of psychoanalysis, 1929, X, p. 90-93. ( cirp.org/library/psych/glover ).
(13) National organization to halt abuse and routine mutilation of males, Estimated world-wide incidence of male circumcision complications, San Francisco : noharmm.org/inciden-ceworld.htm, 1994.
(14) Preston E., « Wither the foreskin », In JAMA, 1970, 213 (11), p. 1853-58. (cirp.org/library/general/preston).
(15) Rhinehart J., « Neonatal circumcision reconsidered. », In Transactional analysis journal, 29 (3), p. 215-21. (cirp.org/libr/psych/rhinehart1).
(16) Van der Kolk B., « The compulsion to repeat the trauma : re-enactment, revictimization, and masochism », In Psychiatric clinic of North America, 1989, XII (2), p. 389-411. (cirp.org/library/psych/vanderkolk).
(17) Freud S., Nouvelles conférences d'introduction à la psychanalyse, 1933, XIX, Paris, PUF, O.C., 1995, XIX, p. 170.
(18) Olievenstein C., L'homme parano, Paris, Odile Jacob, 1992, p. 31 s.
(19) Green A., « Dimensions of psychological trauma in abused children », In Journal of American association of child psychiatry, 1983, 22, p. 213-37. Cité par Goldman (11).
(20) Les blessures symboliques, Paris, Gallimard, 1971, p. 90-91.
(21) Lettre du 4 juin 1980 à Rosemary Romberg Weiner (auteur de Circumcision, the painful dilemma, Bergin & Garvey, 1985), traduite par Sigismond.
(22) American academy of pediatrics. Committee on fetus and newborn, Hospital recommendations for hospital care of newborn infants, 5e édition, Evanston, American academy of pediatrics, 1971, p. 110. (cirp.org/library/statements/aap/#1971).
(23) Van Howe R., « Does circumcision influence sexually transmitted diseases ? », In BJU International, 1999, 83 (suppl. 1), p. 56-62. (cirp.org/library/vanhowe).
(24) Winberg J., Bollgren I., Gothefors L., Herthelius M., Tullus K., « The prepuce : a mistake of nature ? », In Lancet, 1989, 1, p. 598-99. cirp.org/library/disease/UTI/winberg-bollgren).
(25) Øster J., « Further fate of the foreskin. », In Arch Dis Child, 1968, 43, p. 200-203.(cirp.org/library/general/oster).