Amour-propre, orgueil, fierté.
320. (...) Ce sentiment [l’amour-propre] est commun aux animaux et à l'homme, cela est évident, car aimer sa propre personne est la première condition dont un être sensible doit être pourvu. (…).
L'organe de l'amour-propre a été vérifié sur une foule de personnes, sur les deux sexes, sur des nations entières. Il est plus développé chez l'homme que chez la femme. Existant dans de justes limites, il donne la dignité, la noblesse du caractère ; lorsqu'il manque, l'individu se fait remarquer par la modestie, l’humilité, la bassesse ; s'il prédomine, au contraire, il produit l’orgueil, la fierté, la suffisance, insolence, le dédain. Celui qui a ce sentiment joint à l'amour de la gloire peut parvenir à dominer ses semblables, s'il est en même temps intelligent et courageux.
« Gall remarque la tendance qu'ont tous les orgueilleux à s'élever physiquement; ainsi, suivant lui, l'homme fier se redresse et ne perd pas une ligne de sa taille; les enfants chez lesquels perce l'orgueil, se dressent sur la pointe des pieds, montent sur des chaises, sur des lieux élevés pour se donner de l'importance; les rois se placent sur des trônes; ceux qui veulent commander, sur des points culminants, etc. »
Vanité, amour de l'approbation, ambition.
321. (…) Spurzheim l'a bien décrit: « Je considère, dit-il, le sentiment primitif de la vanité comme la faculté qui veut plaire aux yeux d'autrui, et qui fait cas de ce que les autres pensent et disent. Elle aime les caresses, les flatteries et les applaudissements; elle est cause de la parure, de l'ostentation et des décorations. La coquetterie entre dans sa sphère d'activité; elle produit encore l'émulation et ce qu'on appelle le point d'honneur, l'amour de la gloire et des distinctions. Si elle se manifeste par de grands phénomènes, on l'appelle ambition ; si elle s'applique aux choses futiles, elle porte le nom de vanité. Ceux qui sont doués de ce sentiment aiment l'approbation d'autrui: tel est l'ouvrier pour bien faire son ouvrage, le cocher pour bien conduire ses chevaux, elle général pour remporter une victoire. »
A. L'amour-propre est le stimulant nécessaire de toutes les conditions humaines; si, manquant, toute émulation, tout désir de s'élever, de bien faire est éteint, en excès, il produit l'ambition, l'amour des honneurs, et peut faire commettre des bassesses à seule fin de parvenir à imposer à la foule par les décorations.
La vanité blessée à l'occasion d'une préférence dont une autre personne est l'objet fait naître la jalousie. La colère et la haine dérivent aussi d'une blessure faite au sentiment d'amour-propre.
B. La vanité est essentiellement distincte de l'orgueil.
« L'orgueilleux, dit Gall, est pénétré de son mérite supérieur, et traite du haut de sa grandeur, soit avec mépris, soit avec indifférence, tous les autres mortels; l'homme vain attache la plus grande importance au jugement des autres et recherche avec empressement leur approbation. L'orgueilleux compte que l'on viendra chercher son mérite; l'homme vain frappe à toutes les portes pour attirer sur lui l'attention et mendier quelque peu d'honneur. L'orgueilleux méprise les marques de distinction, qui font le bonheur de l'homme vain; l'orgueilleux est révolté par les éloges indiscrets, l'homme vain aspire toujours avec délices l'encens même le plus maladroitement prodigué!....
Antonin Bossu, Anthropologie ou étude des organes, fonctions et maladies de l'homme et de la femme, 5e édition, tome 1er, Bureaux de l’abeille médicale, Paris, 1859, p. 232-233.