FAT, Fatuité (défaut).
Qui dit fatuité indique les défauts du fat ou son mode d'être dans le monde ; et qui prononce le mot fat veut désigner tout individu dont la vanité seule forme le caractère, qui n'agit que par faste et ostentation, qui se croit aimable et cherche à le paraître avec l'esprit d'autrui, sans que cela y paraisse, qui prétend savoir tout ; qui, en un mot, a toutes sortes de prétentions.
Écoutez un fat: il se glorifie de la protection de celui-ci, de ses liaisons avec celui-là, et même de l'amitié d'un grand dont il n'est pas connu. Voyez faire un fat: il étale tout ce qu'il possède aux yeux de tout le monde et se fait toujours beaucoup plus riche qu'il n'est réellement ; bref il est vain dans toutes ses paroles, dans toutes ses actions et jusque dans son silence.
C'est la suffisance qui mène à la fatuité. Elle en est le dernier degré et la forme la plus extrême ; car l'esprit, à force de s'exalter et de se complaire en lui, devient insensé, vide, fade ou fou (fatuus) : c'est Narcisse épris de sa beauté et consumant sa vie à en contempler l'image ; c'est plus encore, car, d'après la Bruyère, le fat aurait, de plus que sa propre admiration, celle des sots qui lui croient de l'esprit.
Toujours est-il que celui qui est infatué de lui-même ne vit aussi qu'en se regardant, se mirant et s'admirant ; son plus grand soin est de paraître au dehors ce qu'il pense être au dedans, un modèle et presque un idéal d'esprit, de goût, d'élégance et de bon ton ; car, quoiqu'on puisse être fat de bien des manières, c'est surtout aux avantages extérieurs que ce vice s'attache, et la vanité dans ce cas devient superficielle comme l'objet dont elle se prévaut.
La fatuité ne saurait vivre dans l'isolement et la retraite, il faut qu'elle apparaisse et se montre ; aussi il en est des fats comme des coquettes, qui préfèrent le désagrément de la censure publique à celui d'un oubli universel.
Évitons ce travers ; sachons nous affranchir de la fatuité, car elle engendre le mépris ; et souvenons-nous que si dans le monde grands et petits méprisent un sot, ils méprisent bien plus encore un fat, la fatuité étant l'ouvrage de l'homme, au lieu que la sottise est celui de la nature.
Félix-André-Augustin Poujol, Dictionnaire des facultés intellectuelles et affectives de l'âme: ou l'on traite des passions, des vertus, des vices, des défauts, etc., J. P. Migne éditeur, 1857, col. 484.