Les ecclésiastiques
ainsi que les laïques, ont leurs titres particuliers.
On donne au pape le plus
auguste de tous les titres, qui est celui de Très-Saint, de
Sainteté et de
Béatitude. Ils se sont, par humilité, intitulés Serviteurs
des Serviteurs de Dieu (Servus Servorum Dei), depuis Saint
Grégoire qui l'avait pris de Saint Augustin, lequel s'appelle ainsi
dans plusieurs de ses épîtres.
Les cardinaux de la
Sainte Église Romaine ont eu le titre d'Illustrissimes. Celui
d'Éminentissime lui fut
subrogé par un décret que fit le pape Urbain VIII, le 10 juin
1630.
Le Grand Maître de Malte
a aussi le titre d'Éminentissime, et celui d'Éminence,
au lieu d'Altesse.
Les cardinaux de maison
souveraine retiennent plutôt le titre d'Altesse, que
d'Éminence.
Les Archevêques-Électeurs
du S. Empire, les autres prélats souverains le prennent aussi.
Les prélats en général
s'appellent Pères ; et depuis le règne du roi Louis
XIII, ils se donnent entre eux, en France, le titre de Monseigneur.
On remarque dans les
registres de la Chambre des Comptes, qu' Odo Rigaut, archevêque de
Rouen, qui avait été religieux de l'ordre de S. François, prenait
la qualité de Frère Odo, par permission divine archevêque
de l'Église de Rouen, Très Indigne Ministre, en un acte
donné à Paris l'an 1266, le dimanche après la fête de S. Barnabé
Apôtre, qui contient qu'il avait créé un doyen en l'église S.
Melon de Pontoise.
Au temps passé, environ
le siècle de Charlemagne, les patriarches et les archevêques qui
sont révérés dans leurs provinces, ont eu le titre de
Révérendissimes, et Pères, comme Monseigneur Jean,
par la grâce de Dieu archevêque de Milan, dans une charte du 18
novembre 1354, indiction 8 ; les évêques, celui de Révérends,
qualité que prenait aussi Monsieur Gerbace, archevêque de
Mayence, vice-chancelier-du saint Empire, dans une charte de Charles
IV Empereur, de l'an 1366, indiction 4, aux calendes de mai. Il y a
eu aussi des évêques qui ont eu la qualité de Vénérables,
ainsi qu'Ernest, archevêque de Prague, en une charte de cet
empereur de l'an 1358, indiction 11 et Gérard et Lampert,
évêques de Wirsbourg et de Bamberg, en une charte de l'an 1378,
indiction 1., 13e calendes d'avril.
Les abbés étaient aussi
qualifiés Vénérables ou Révérends. Guillaume,
doyen d'Autun, écrivant en 1147 à l'abbé Suger au sujet de
l'élection que les chanoines d'Autun voulaient faire de
l'archidiacre Henri, frère du duc de Bourgogne, pour leur évêque,
appelle Suger, par la grâce de Dieu Révérend Abbé, Père et
Seigneur de Saint Denis.
Les prieurs & les
moines, qui tiennent la Règle de Saint Benoît, et ceux qui
suivent les Constitutions de Saint Bernard et de Saint Bruno,
prennent le titre de Dom.
Les abbesses, les
prieures, les religieuses ou nonnes avaient le titre d'Honnêtes
; et celui de Discrète Personne s'attribuait aux
chanoines.
Le terme de Grandeur
est nouveau [en 1678]. En latin, toutes ces qualités d'Altesse,
d'Éminence, d'Excellence et de Grandeur, se
confondent ordinairement dans le mot de Celsitudo ; mais elles
se distinguent en français.
Les religieux prennent, à
présent, le titre de Pères, qui est propre aux évêques et
aux abbés : car le mot d'abbé signifie « père ».
Néanmoins, les anciens abbés en parlant d'eux-mêmes, se disaient
Frères, comme il se voit en un
titre de l'an 1381 que Guillaume, abbé de Cîteaux, s'appelle
Frère : « Venerabilibus in Christo coabbatibus
suis in regno Franciæ constitutis, et eorum majoribus officialibus
frater Guillelmus [Guillaume IV
de Vaucelles, abbé de 1316 à 1335], abbas Cisterciensis
[À ses Vénérables
co-abbés en Christ, établis
dans le royaume de France, et à leurs plus important ministres, le
Frère Guillaume,
etc., 21 décembre 1333, « État des abbayes de l'ordre de
Cîteaux qui payent la dîme au roi. » (Ex libro
Cameræ compotorum signato,
NOSTER, fol. 381.].
Mais le plus souvent ils prennent le titre de Dominus,
comme Thibaud, abbé de Listeaux, et Robert, abbé de Pontigny ; ce
qui a du rapport avec le terme de Dom.
Le mot de prieur
a beaucoup de rapport à celui de père, car le prieur
fait la charge de père envers ses inférieurs. Il y en a qui
prennent, par surabondance, le titre de Révérend Père, et
quelques-uns en commettant un barbarisme, ont appelé leurs
supérieurs Très Révérendissimes, ne se contentant pas du
superlatif.
Le titre de Gardien
et de Custode est commun dans l'ordre des Mineurs. Celui
de Correcteur,
en celui de Minimes et les Trinitaires dits Mathurins,
appellent Ministres
tous leurs supérieurs.
Référence
Gilles
André de La Roque, Traité
de la Noblesse,
Étienne Michallet, Paris, 1678, p. 311 et suiv. L'orthographe et la
ponctuation ont été modernisées par l'auteur de ce blog. Ce
dernier a également ajouté ce qui se situe entre crochets ([...]).