Première
notification
sur
l'autorité des textes conciliaires :
29
novembre 1963
(Version
modifiée d'un texte adopté, un mois auparavant, par la Commission
doctrinale.)
Pericle Felici, cardinal (1911-1982) |
Elle
insiste déjà sur le « but pastoral du concile actuel »
et distingue clairement entre « ce qu'en matière de foi et de
mœurs le Concile définit de manière infaillible » et les
« autres points que le Concile n'aura pas déclaré clairement
comme tels » et qui sont « exposés par le
magistère authentique comme doctrine de l'Église. »
Le
secrétaire générale du Concile, Pericle Felici, au même moment,
distingue, de façon classique, doctrine et discipline et déclare
que la « Constitution sur la Sainte Liturgie » et le
« Décret sur les moyens de communication sociale » qui
attendent d'être promulguées, ne traitent « que d'une matière
disciplinaire ».
Nouvelle
formulation
sur
l'autorité des textes conciliaires :
6
mars 1964
(Portée
à la connaissance du Concile avant le dernier vote sur le De
Ecclesia, le 16 novembre 1964.)
Compte
tenu de l’usage des conciles et du but pastoral du Concile actuel,
celui-ci ne définit comme devant être tenus par l’Église que les
seuls points concernant la foi et les mœurs qu’il aura clairement
déclarés tels. Quant
aux autres points proposés par le Concile, en tant qu’ils sont
l’enseignement du magistère suprême de l’Église, tous et
chacun des fidèles doivent les recevoir et les entendre selon
l’esprit du Concile lui-même qui ressort soit de la matière
traitée, soit de la manière dont il s’exprime, selon les normes
de l’interprétation théologique.
(La
même réponse fut donnée le 15 novembre 1965 au sujet de la future
constitution dogmatique sur la Révélation et sa transmission.)
Référence
Christoph
Theobald, Le Concile Vatican II. Quel avenir ?,
coll. « Unam Sanctam », nouvelle série, Éd. Du Cerf,
Paris, 2015.
Pericle
Felici, Notification sur l'autorité
des textes conciliaires :
16
novembre 1964
On
a demandé quelle devait être la qualification théologique de la
doctrine exposée dans le schéma sur l'Église et soumise au vote. À
cette question, la commission doctrinale a donné la réponse
suivante: cf. ci-dessus, la notification du 6 mars 1964.
Référence
« Notifications
faite au cours de la 123e congrégation générale », in Le
Concile Vatican II, 1962-1965, Artège,
2012, p. 121
Paul
VI, Audience générale, 12 janvier 1966 :
(…)
L'héritage du Concile est constitué par les documents
successivement promulgués au terme de ses discussions et de ses
délibérations. Ces documents sont de diverses natures : il y a des
constitutions, des décrets et des déclarations, mais tous ensemble,
ils forment un corps de doctrine et de lois qui doit donner à
l’Église ce renouveau pour lequel le concile a été décidé.
Connaître,
étudier, appliquer ces documents, tel est le devoir providentiel de
la période post-conciliaire.
Il
faut faire attention : les enseignements du Concile ne
constituent pas
un système organique et complet de la doctrine catholique.
Celle-ci est bien plus vaste, comme chacun le sait, et le concile ne
l'a pas contestée ni modifiée substantiellement. Bien au contraire,
il
l'a confirmée, illustrée, défendue et développée par une
apologie très autorisée, pleine de sagesse, de vigueur et de
confiance.
C'est
cet
aspect doctrinal du Concile
que nous devons noter en premier lieu, en l'honneur de la Parole de
Dieu qui demeure unique et éternelle, comme la lumière qui ne
s'éteint pas, et pour la consolation de nos âmes, à partir de la
voix franche et solennelle de l'expérience du Concile dont la charge
providentielle a été confiée par le Christ au magistère vivant de
l’Église pour garder, pour défendre, pour interpréter le «dépôt
de la foi » (cf. Humani generi
, Acta Apostolicæ Sedis, 1960, p. 567).
Nous
ne devons pas détacher les enseignements du Concile du patrimoine
doctrinal de l’Église, mais bien voir comme ils s'insèrent en
lui, comme ils sont cohérents avec lui, et comme ils lui apportent
un témoignage, un accroissement, une explication, une application.
Alors,
même les « nouveautés » doctrinales, ou disciplinaires du
Concile apparaissent dans leurs justes proportions, elles n'entravent
pas la fidélité de l'Église à sa fonction d'enseignement, et
elles acquièrent ce sens vrai qui la fait resplendir d'une lumière
plus forte.
Par
conséquent, le Concile aide les fidèles, qu'ils soient enseignants
ou enseignés, à surmonter ces états d'esprit – de déni,
d'indifférence, de doute, de subjectivisme, etc. -- qui sont opposés
à la pureté et la force de la foi.
Il
constitue un grand acte du magistère ecclésial ; et celui qui
adhère au Concile reconnaît et honore avec lui le magistère de
l'Église ; ce fut la première idée qui poussa le Pape Jean XXIII,
de mémoire bénie, à convoquer le Concile, comme il le dit bien en
l'inaugurant : "ut iterum magisterium ecclesiasticum (...) affirmaretur" [« afin que soit
affirmé de nouveau le magistère ecclésial »] ; « Notre
but était, ainsi s'exprimait-il, en convoquant cette grande
assemblée, de réaffirmer le magistère ecclésial » (AAS
1962, p. 786). « Ce qui importe le plus pour le Concile œcuménique,
a-t-il poursuivi, est la chose suivante : que le dépôt sacré de
la doctrine chrétienne soit plus efficacement gardée et exposée »
(ibid P. 790.).
Il
ne serait ainsi pas vrai de penser
-
que le Concile représente un distance, une pause, ou, comme certains
le pensent, une émancipation vis-à-vis de l'enseignement
traditionnel de l’Église,
-
qu'il autorise et promeut un conformisme facile vis-à-vis de la
mentalité de notre époque dans ce qu'elle a d'éphémère et de
négatif plutôt que [dans ce qu'elle a] de sûr et de scientifique,
-
ou qu'il autorise quiconque à donner la valeur et l'expression qu'il
croit aux les vérités de la foi.
Le
Concile ouvre de nombreux horizons nouveaux aux études bibliques,
théologiques et à [l'étude] des sciences humaines, il invite à
rechercher et à approfondir les sciences religieuses mais sans
priver la pensée chrétienne de sa rigueur spéculative, et ne
permet pas que, dans l'école philosophique, théologique et
scripturaire de l'Église pénètre l'arbitraire,
l'incertitude, la servilité, la désolation, qui caractérisent
de nombreuses formes de la pensée religieuse moderne, quand elle est
privée de l'assistance du magistère.
Certains
se demandent qu'elle est l'autorité, la qualification théologique
que le Concile a voulu donner à ses enseignements, sachant qu'il
a évité de donner des définitions dogmatiques solennelles,
engageant l'infaillibilité du magistère ecclésial.
Et
la réponse est connue de ceux qui se souviennent de la déclaration
conciliaire du 6 mars 1964, répétée le 16 novembre 1964 : étant
donné le caractère pastoral du Concile,
-
il a évité de prononcer d'une manière extraordinaire des dogmes
comportant la note d'infaillibilité ;
-
mais il a néanmoins muni ses enseignements de l'autorité du
magistère ordinaire lequel magistère ordinaire, si
manifestement authentique, doit être accepté docilement et
sincèrement par tous les fidèles selon l'esprit du Concile
concernant la nature et les objectifs de chaque document. (...).
Source :
Version française et édition par l'auteur de ce blog.
Paul
VI, Audience générale, 29
septembre 1976.
(…)
La vérité de la foi, dans son expression authentique et
autorisée, ne change pas avec le temps et ne s'use pas avec
l'histoire.
Elle
peut admettre, et même exiger, un langage pédagogique et pastoral
vivant. Il pourra ainsi s'esquisser pour elle une ligne de
développement, à condition qu'elle soit conforme à la célèbre et
traditionnelle sentence de saint Vincent de Lérins (petite île en
face de Cannes, dans la Gaule méridionale), moine du Ve
siècle qui, dans son bref mais célèbre Commonitorium, a
défendu la tradition doctrinale de l’Église selon cette formule : « Ce qui partout, toujours et par tous » a été cru
doit être considéré comme faisant partie du dépôt de la foi.
Qu'il
n'y ait pas de libre invention, de modernisme ; que rien ne
donne à la foi une interprétation étrangère à celle du magistère
de l'Église.
Cette
fixité dogmatique défend le patrimoine authentique de la
Révélation, c'est-à-dire de la religion catholique. Le
Credo ne change pas, il ne vieillit pas, il ne se dissout pas. (...)
Source :
Pour
la traduction : http://christusrex.free.fr/magistral.htm
Jean-Paul
II, Discours aux participants
à
la réunion plénière du Sacré Collège des cardinaux,
5
novembre 1979.
(…)
De cette manière, nous rejoignons toujours plus la perspective
historique de la mission de l’Église qui s’unit pour nous à la
perspective théologique de la foi, puisque cette « union dans la
vérité et dans la charité », c’est-à-dire l’unité
spirituelle liée à la dignité « de fils de Dieu » a été
montrée à chaque homme et à tous les hommes.
Nous
devons donc faire en sorte que cette formule synthétique, que le
Concile nous a laissée dans sa constitution pastorale [Gaudium et
spes, n°25 : « il y
a une certaine ressemblance entre l’union des personnes divines et
celle des fils de Dieu dans la vérité et dans la charité. »],
unisse vraiment en elle tous les efforts particuliers qui constituent
l’œuvre de la réalisation du Concile.
Dans
sa réalité la plus profonde, cette œuvre est symbolisée par
l’arbre de la vie, avec lequel l’homme autrefois a rompu son lien
du fait du péché originel (cf. Genèse 3, 1-7), et qui, avec le Christ,
a recommencé à se développer vigoureusement dans l’histoire de
l’humanité.
Le
Concile n’a pas tant dévoilé à nos yeux l’éternel mystère de
ce développement, qu’il n’a mis en relief, d’une façon
particulièrement pénétrante, son étape contemporaine.
C’est
pourquoi l’obéissance à l’enseignement du Concile Vatican II
est obéissance à l’Esprit-Saint, qui est donné à l’Église
afin de rappeler, à chaque moment de l’Histoire, tout ce que le
Christ lui-même a dit pour enseigner toute chose à l’Église (cf.
Jn 14, 26).
L’obéissance
à l’Esprit-Saint s’exprime dans la réalisation authentique
des tâches indiquées par le Concile, en plein accord avec
l’enseignement qui y est proposé.
6.
On ne peut pas traiter de ces tâches comme si elles n’existaient
pas. On ne peut pas prétendre pour ainsi dire, faire remonter à
l’Église le cours de l’Histoire de l’humanité.
Mais
on ne peut pas non plus courir présomptueusement en avant, vers des
manières de vivre, de comprendre et de prêcher la vérité
chrétienne, et finalement vers des modes d’être chrétien,
prêtre, religieux et religieuse, qui ne s’abritent pas sous
l’enseignement intégral du Concile ; intégral, c’est-à-dire
entendu à la lumière de toute la sainte Tradition et sur la base du
magistère constant de l’Église
[IT. :
« cioè
inteso alla luce di tutta la Santa Tradizione e sulla base del
costante Magistero della Chiesa stessa. »
LAT. : « intellegitur
sub sanctae Traditionis lumine et quatenus ad constans Ecclesiae
ipsius magisterium refertur. »].
Tâche
grande et multiple que celle qui place devant nous l’impératif de
la réalisation du Concile ! Elle demande une vigilance continuelle
par rapport à l’authenticité de toutes les initiatives dans
lesquelles s’articulera cette réalisation.
L’Église,
communauté vivante des fils de Dieu unis dans la vérité et dans
l’amour, doit faire un grand effort, en ce moment, pour entrer
dans la vraie voie de la réalisation de Vatican II et se dégager
des propositions contraires, chacune desquelles se révélant, en
son genre un éloignement de cette voie. Cette voie seule —
autrement dit l’obéissance honnête et sincère à l’esprit de
vérité — peut servir à l’unité et en même temps à la force
spirituelle de l’Église.
Joseph cardinal
Ratzinger,
Discours aux évêques chiliens,
13
juillet 1988
Le
second concile du Vatican n’est pas abordé comme une partie de
l’ensemble de la Tradition vivante, mais comme la fin de la
Tradition et un redémarrage à zéro.
La
vérité est que le Concile n’a défini aucun dogme et a voulu
consciemment s’exprimer à un niveau plus modeste, simplement comme
un concile pastoral.
Pourtant,
nombreux sont ceux qui l’interprètent comme s’il était
presque un super-dogme qui ôte toute importance au reste.
Cette
impression est surtout renforcée par certains faits courants. Ce qui
était autrefois comme le plus sacré – la forme transmise de la
liturgie – apparaît d’un seul coup comme ce qu’il y a de plus
défendu et la seule chose que l’on puisse rejeter en toute sûreté.
On ne tolère pas la critique des options de la période
post-conciliaire ; mais, là où les antiques règles sont en jeu, ou
bien les grandes vérités de la foi – par exemple, la virginité
corporelle de Marie, la résurrection corporelle de Jésus,
l’immortalité de l’âme, etc. – on ne réagit même plus, ou
alors avec une modération extrême. (…)
Tout
cela conduit de nombreuses personnes à se demander si l’Église
d’aujourd’hui est réellement celle d’hier, ou si on l’a
remplacée par une autre sans les en aviser. La seule manière de
rendre crédible Vatican II est de le présenter clairement pour ce
qu’il est : une partie de l’entière et unique Tradition de
l’Église et de sa foi. (…)
Néanmoins
il est vrai que, dans le mouvement spirituel de la période
post-conciliaire s’est manifesté un oubli, voire une
suppression de la question de la vérité : peut-être
touchons-nous ainsi le problème crucial de la théologie et de la
pastorale d’aujourd’hui. La «vérité» est apparue comme une
prétention trop altière, un « triomphalisme » que l’on ne
pouvait plus se permettre.
Ce
processus se vérifie d’une manière claire dans la crise affectant
l’idéal et la pratique missionnaires. Si nous ne mettons pas
l’accent sur la vérité dans l’annonce de la foi, et si cette
vérité n’est plus essentielle au salut de l’homme, les
missions perdent leur signification. En effet, on a déduit et on
déduit encore que, pour l’avenir, on doit seulement viser à ce
que les chrétiens soient de bons chrétiens, les musulmans de bons
musulmans, les hindous de bon hindous, etc. Mais comment peut-on
savoir quand quelqu’un est un «bon» chrétien ou un «bon »
musulman?
L’idée
que toutes les religions ne sont, à proprement parler, que des
symboles de ce qui est, en dernière analyse, l’Incompréhensible,
gagne rapidement du terrain dans la théologie et a déjà
profondément pénétré la pratique liturgique.
Là
où un tel phénomène se produit, la foi comme telle est
abandonnée, parce qu’elle consiste dans le fait que je me
rends à la vérité en tant que je la reconnais. C’est ainsi que
nous avons toutes les raisons de retourner à une conception
correcte sur ce terrain également.
Source :
http://www.croix-glorieuse.org/files/liturgie_traditionnelle/discours_ratzinger_eveques_chiliens.pdf
Joseph cardinal
Ratzinger
1991
Si
quelque part, on en venait à former une « majorité »
contre la foi de l’Église d’autres temps, ce ne serait
absolument pas une majorité.
Référence :
Joseph cardinal Ratzinger, La Chiesa,
Milan, 1991, p. 71.