Jean-Marie Rodrigue cardinal Villeneuve (1883-1947) |
(…)
9. C'est d'abord dans la tenue en général que se manifeste le
laisser-aller qui, trop souvent, hélas, conduit à l'impureté.
Que
de personnes sont esclaves de ces modes qui ignorent les règles
élémentaires de la modestie et qui constituent parfois une
provocation directe au mal.
10.
Grâce à Dieu, les femmes chrétiennes de nos milieux ne paraissent
à l'église et, généralement dans les assemblées publiques, que
décemment vêtues. De même il nous plaît de constater que la
plupart des femmes vont sur la rue convenablement mises.
Mais que
sera-ce demain, si l'on songe à la vogue croissante de « ces
vêtements si exigus ou tels qu'ils semblent faits plutôt pour
mettre davantage en relief ce qu'ils devraient voiler », comme
l'observe Pie XII (1).
Trop
de jeunes filles acceptent facilement les raccourcis indécents,
parfois provocateurs, les décolletés audacieux où elles ont
parfois l'impudence de placer la croix de Notre-Seigneur, Maître de
pureté !
Trop
d'entre elles s'exhibent en « shorts », encore
timidement sur la rue, mais avec sans-gêne au jeu ! Souvent elles
réduisent encore leur costume de plage. Immodestes
de leur nature même, ces vêtements doivent être bannis de nos
mœurs, même dans les sports (2).
Notons de plus que le port du
pantalon sous le moindre prétexte, ou, ce qui est pire, dans le but
de s'exhiber en public, n'est pas digne d'une vraie chrétienne.
11.
Au déshabillé et au laisser-aller de la vie en plein air s'ajoute
l'usage déplorable et trop répandu chez des chrétiennes même
pratiquantes de circuler à l'intérieur de leur foyer dans le plus
léger accoutrement. Comme on est loin des délicatesses de nos mères
chrétiennes d'autrefois !
12.
On plaindrait les femmes de mœurs douteuses qui accepteraient ces
raccourcis, ces décolletés, ces déshabillés. Mais
qu'une chrétienne, une épouse, une mère, une jeune fille, loin de
réagir contre ces courants pervers, s'y engagent trop souvent à
cœur joie, désapprennent peu à peu la modestie, l'ignorent, la
méprisent même, comment ne pas en être stupéfié et attristé
jusqu'aux larmes !
13.
L'homme lui-même n'échappe pas au goût de l'exhibition de sa chair
: on va le torse nu en public, on porte un pantalon ou un maillot
collant trop abrégé. On
commet par là des infractions à la vertu de modestie, quand on
n'est pas occasion de péché, en pensée ou en désir, pour le
prochain.
14.
Ce qui nous paraît plus grave encore, non certes comme provocation
au mal, mais plutôt comme habitude néfaste et pouvant conduire très
loin, c'est, dans le costume des fillettes, la robe trop écourtée,
la nudité complète des bras et des jambes, quand cela ne va pas
jusqu'à celle du torse.
Sans
le savoir, ces pauvres enfants scandalisent ainsi, et souvent, leurs
petits frères. Comment une mère chrétienne peut-elle l'oublier ?
Si ces enfants aperçoivent dans la rue quelque soutane, signe du
gardien de la modestie et de la morale, elles se hâtent de tirer ce
qui leur reste de vêtement pour se couvrir.
Ces
fillettes vieilliront. Pour être modestes, et souvent pour être
pures, elles devront remonter tout un courant qui les a entraînées
jusque là. Le pourront-elles vraiment ? Pauvres mères, vous violez,
sachez-le, vos graves devoirs d'éducatrices.
15.
L'immoralité se sert donc de la mode pour corrompre les âmes ; elle
utilise aussi le sport, pourtant si utile et si nécessaire pour la
santé du corps.
C'est
une ruse de Satan de détourner de leur fin des jeux, des plaisirs,
des divertissements, des amusements dont le but premier est de
reposer le corps en rendant plus agréable la vie en société.
Satan
se réjouit de ces « parties de sport qui se déploient dans
des conditions de vêtements, d'exhibitions et de camaraderie
inconciliables avec la modestie même la moins exigeante » (3).
De
fait, on met tant de soin à créer pour le sport le vêtement qui
déshabille ou qui séduit, et, à la vérité, sous les plus
fallacieux prétextes ; on participe avec tant de sans-gêne à ces
parties de plaisirs qui font des jeunes gens et des jeunes filles des
compagnons de vie d'un jour, loin des yeux et des regards protecteurs
; la camaraderie devient vite familiarité déplacée, et, les
liqueurs alcooliques aidant, la familiarité tourne en compagnonnage
éhonté.
Ainsi
les excursions, les parties de ski ou de chalet, l'exercice du patin
sous toutes ses formes, d'autres amusements encore, deviennent
directement ou indirectement des occasions de fautes d'autant plus
alléchantes qu'elles se présentent sous le couvert d'un délassement
de soi légitime.
(…)
42.
Tel est donc le jugement du chrétien sur ce problème angoissant de
l'immoralité moderne. Conscient de sa dignité d'homme et de
chrétien, conscient des funestes conséquences de l'immoralité sur
la famille et la société civile, il estime à un haut prix la belle
vertu de pureté et il la pratique selon les exigences de son état
de vie.
Il
comprend que la morale est supérieure au plaisir et à la mode,
qu'il est des limites qu'il n'est jamais permis de franchir sans
faire injure à sa conscience et à sa foi. Pour lui, la moralité,
et spécialement la pureté, sont des trésors qu'il importe de
protéger contre toute violation. En les protégeant, par tous les
sacrifices nécessaires, il a la joie d'accroître la gloire de
l’Église sa Mère et la satisfaction d'aider ses frères.
(…)
51.
La lutte est donc inévitable. Vous l'accepterez courageusement, et
pour en sortir victorieux, vous surveillerez les occasions de péché,
vous les éviterez avec la grâce de Dieu : vous n'entretiendrez pas
de pensées mauvaises, vous ne réchaufferez aucun désir inavouable,
vous fuirez les mauvaises compagnies, vous refuserez de laisser
corrompre votre esprit par une littérature obscène et des
illustrations provocatrices, vous conserverez votre cœur ferme et
droit en évitant les fréquentations risquées, les danses
immorales, e cinéma corrupteur, les réunions sociales païennes,
l'oisiveté, mère de tous les vices, et l'intempérance dans l'usage
des boissons enivrantes.
En
un mot, pour pratiquer la pureté, vous cultiverez la pudeur, qui est
une crainte instinctive de 'âme aux premières approches du mal ;
vous cultiverez la modestie, qui est la modération, le sens de la
mesure, qui fait éviter habituellement tout ce qui est de nature à
exciter en vous-mêmes et dans les autres la passion sexuelle. La
pudeur et la modestie, tels sont les ornements et les gardiennes de
la pureté.
(…)
57.
Votre [celle de pères et mères de famille] action éducatrice
s'exercera dès le bas âge, à cette période où se créent des
habitudes qui influenceront toute la vie. De grâce, n'habituez pas
vos enfants au déshabillé, nous oserions dire, au nudisme. « O
mères chrétiennes, s'exclame le Souverain Pontife, si vous saviez
quel avenir d'angoisses et de périls, de honte mal contenues, vous
préparez à vos fils et à vos filles en les accoutumant
imprudemment à vivre à peine couverts, et en leur faisant perdre le
sens de la modestie, vous rougiriez de vous-mêmes et vous
redouteriez l'injure que vous vous faites à vous-mêmes et le tort
que vous causez aux enfants que le ciel vous a confiés pour les
élever chrétiennement » (4).
Notes
(2)
Synode de Québec (1940), décret 102, note : « Que si l'on
demande en quoi consiste un habit modeste et décent pour une
chrétienne, on comprendra que c'est celui qui couvre la poitrine et
les bras d'étoffes non transparentes, qui descend au moins à
mi-jambe, et dont la coupe d'une ampleur convenable protège la
pudeur en dissimulant les lignes du corps » (Cardinal Rouleau,
8
décembre 1930, Mandements
des Évêques de Québec, vol.
XIII, Supplément 45) [en fait : 36].
S.[on]
E.[xcellence] le Cardinal Villeneuve, Communication de
l'Archevêché de Québec contre les modes païennes, 27 juin 1945.
Semaine
Religieuse de Québec, 57e année, n° 44, 5 juillet
1945. p. 690.
S.
E. Mgr Arthur Douville, Mandements des Évêques de
Saint-Hyacinthe, vol. XXI, p. 354.
(3) Pie XII, La
Mode, Discours du 22 mai
1941, E.S.P.
(4)
Pie XII, ibid.
Référence
Archevêques
et évêques de la province de Québec, « Croisade de pureté »,
Lettre
pastorale collective,
n°114, 5 mai 1946 ; paru dans : Mandements,
lettres pastorales et circulaires des évêques du Québec,
volume 17, 1943-1954, Chancellerie de l'archevêché, Québec, 1955,
p. 241-243 ;
p. 253-254 ;
p. 257 ;
p.
259.
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