[Orthographe modernisée.]
Une hardiesse et une timidité excessive sont également contraires à la vraie politesse qui veut qu'on parle et qu'on agisse d'un air modeste et d'un air aisé.
La timidité ne se corrige guère par de simples avis, encore moins par des railleries et par des reproches : elle ne se corrige que par l'usage du monde ; et même il y a des personnes qui n'ont jamais pu se vaincre entièrement là-dessus. La moindre chose les déconcerte. Ils n'agissent, et ils ne parlent librement qu'avec leurs amis particuliers et ils donnent lieu à ceux devant qui ils paraissent avec cet air contraint et embarrassé, de juger peu favorablement de leur esprit.
Il est bon de paraître ne faire pas trop d'attention à une personne timide; cela la met plus à son aise Il faut quelquefois exciter fa confiance par des louanges courtes et mesurées. Elle plairait si elle pouvait se flatter de plaire; mais des éloges trop forts ne feraient qu'augmenter son embarras.
La timidité a toutes les apparences de la modestie, mais ce ne sont souvent que de fausses apparences.. Elle ne suppose pas toujours l'exemption d'orgueil ou de présomption, encore moins l'exemption de vanité. J'ai vu des gens timides, étonnés eux-mêmes de se trouver tels parce qu'ils savaient bien , disaient-ils qu'ils ne manquaient pas d'esprit,, et qu'ils n'étaient pas plus dépourvus que d'autres des moyens de plaire. Il y a donc des timides présomptueux. Loin de l'occasion, ils s'animent par la vue et le sentiment de leur prétendu mérite. Ils croient qu'ils vont se présenter en compagnie avec assurance, et y parler avec liberté : mais à peine y sont-ils, qu'ils se démontent et s'étourdissent.
D'autres, et c'est le plus grand nombre, ont plus de vanité que de présomption. Ils ne sont timides que parce qu'ils veulent trop plaire, et qu'ils sont trop sensibles aux jugements qu'on peut faire d'eux. Ils ne parlent qu'en tremblant, parce qu'ils ne savent comment on prendra ce qu'ils disent et s'il est propre à leur faire honneur.
La présomption produit le mépris des autres, et par-là le manquement aux égards qui leur sont dus. Le défaut d'une juste confiance en soi-même, produit une pudeur niaise, et un embarras ridicule. Ainsi il faut avoir bonne opinion des autres, et n'avoir pas trop mauvaise opinion. de soi-même.
Référence
Abbé Nicolas-Charles-Joseph Trublet, Essais sur divers sujets de littérature et de morale, seconde édition revue, corrigée, et augmentée, Briasson, Paris, 1737, p. 329-331.
Abbé Nicolas-Charles-Joseph Trublet, Essais sur divers sujets de littérature et de morale, seconde édition revue, corrigée, et augmentée, Briasson, Paris, 1737, p. 329-331.
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